La démocratie des marchés financiers
Alors que l’Europe est embourbée depuis plusieurs mois dans
une crise inextricable, l'actualité s'est accélérée ce week-end en Grèce et en
Italie avec la nomination de deux nouveaux premiers ministres. A Athènes, Lucas
PAPADEMOS, et à Rome, Mario MONTI qui a été investi Président du Conseil en
lieu et place de Silvio BERLUSCONI. Lucas PAPADEMOS et Mario MONTI... deux
politiques, certes, mais surtout deux techniciens. Le premier a été vice
Président de la Banque Centrale Européenne... il a présidé à l'adoption de
l'euro par la Grèce en 2002... le second a œuvré en temps que Commissaire
européen à la Concurrence. Economiste émérite, libéral assumé, Mario MONTI est
l'homme qui a notamment infligé une amende de 500 millions d'euros au groupe
MICROSOFT au nom de la lutte contre les monopoles. Membre du très sélect et
fermé cercle international des affaires Bilderberg ; Président de la branche
européenne de la Commission Trilatérale où se retrouvent décideurs américains,
japonais et européens, sa carrure internationale a de l'étoffe. Fini donc, les politiques
pure souche... pour redresser la barre, on donne le gouvernail à des hommes
liges qui, même s'ils s'en défendent, appliqueront une stricte feuille de route
bien préparée en hauts lieu
Et, surtout, pour rassurer les marchés financiers.
Oui car c'est la guerre. Le mot est lâché dans les
états-majors politiques... la guerre contre les spéculateurs... à chacun
désormais, de choisir son camp. Mais placer des techniciens à la tête d'Etats
en difficultés suffira-t-il pour gagner la bataille face aux marchés ? La
partie n'est pas gagnée d'avance. Pour le Président de l'Autorité des Marchés
Financiers Jean-Pierre JOUYET : "la dette souveraine est devenue un
produit d'appel et de notoriété" à la fois pour les opérateurs financiers
mais aussi pour les agences de notation. Les marchés ont imposé leur loi...
CQFD.
Est-ce à dire que le politique n'a plus son rôle à
jouer ?
Beaucoup s'interrogent sur l'aspect démocratique de ce
mouvement. Les marchés sont tout sauf des philanthropes. Et comme le remarquait
hier soir dans l'émission Radio France Politique Jean-Pierre CHEVENEMENT,
jusqu'où s'appliquera le droit d'ingérence des opérateurs financiers en Europe
? Et que dire de la méthode. Même si beaucoup peut lui être reproché,
n'aurait-on pas gagné à faire partir Silvio BERLUSCONI par des élections
démocratiques justement... dans les deux cas : en Grèce et en Italie, on a
négocié une sortie honorable mais loin du peuple... une sortie par la porte
arrière des palais gouvernementaux. N'oublions pas que des échéances
électorales approchent, notamment en France... gageons que tout cela ne se
traduise pas par un « raz le bol » général et extrémiste dans les
urnes… ça serait l'autre effet pervers de la crise économique et financière.
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