Chine/Europe : la raison du plus fort
Hasard du calendrier, au moment où le ministre français de l'Economie Pierre Moscovici était en visite à Pékin pour affermir les relations économiques et financières avec l'Empire du Milieu, le chef du gouvernement chinois rencontrait à Bucarest 16 de ses homologues d'Europe centrale et orientale. Un sommet Europe de l'Est/Chine, une semaine après le lancement de négociations sur un accord d'investissements réciproques.
En l'espace de 24 heures, la Chine a signé avec la Roumanie 13 protocoles dans le nucléaire, l'énergie, l'agroalimentaire et les transports.
La Chine est-elle en train de nous tailler des croupières dans ces secteurs ?
Les accords signés hier devraient permettre à la CGN (la compagnie nucléaire nationale chinoise) de jouer un rôle important dans la construction de deux nouveaux réacteurs dans l'unique centrale nucléaire roumaine.
Depuis 2011, la Roumanie cherche des investisseurs après le retrait de plusieurs actionnaires du projet dont GDF-SUEZ qui a fait part de ses incertitudes sur la pertinence du dossier. La Chine était en embuscade. Elle n'a pas perdu de temps.
Autre projet, cette fois entre la Chine, la Serbie et la Hongrie pour moderniser la voie ferrée entre Belgrade et Budapest. Est-ce à dire que le train à grande vitesse chinois prendra la place de notre TGV construit par Alstom ? N'allons pas trop vite en besogne mais il convient de rester prudent avec toutes ces Républiques de l'Est qui frappent à la porte de l'Europe sans jouer à 100 % la carte économique européenne.
Pourquoi cette attitude ?
Le Premier ministre roumain promet qu'il respectera les règles et ne dépassera pas la ligne rouge imposée par Bruxelles. Mais peut-il pour autant discriminer des entreprises étrangères - chinoises en l'occurrence - si leurs offres sont meilleures ?
Dans le contexte de concurrence légale du commerce mondial, les compagnies chinoises sont effectivement bien plus compétitives. Elles présentent généralement les meilleures offres sur les plans financier et technique. Et puis l'Europe industrielle souffre de son manque d'union. L'Allemand Siemens a réussi à vendre à Pékin un produit 100% Siemens : le train rapide VALERO.
En se plaçant en Europe de l'Est, les Chinois vont-ils valoriser le transfert de technologie européen ? Si c'est le cas, on ne pourra pas le reprocher au français Alstom qui - contrairement à SIiemens - a joué la prudence en ne souhaitant pas convoler intégralement avec les groupes chinois.
La Chine ne va pas s'arrêter en si bon chemin
Après l'Afrique, l'Europe est le nouvel eldorado pour Pékin. L'an dernier, l'Union européenne représentait déjà plus du tiers (35 % exactement) des fusions-acquisitions chinoises : la crise de la zone euro y a rendu les investissements attractifs pour la Chine dont les réserves de changes s'élèvent à 2.500 milliards d'euros (un an de PIB français). Les chinois détiennent aujourd'hui 10 % de la dette de l'eurogroupe.
Bruxelles a beau rappeler les règles de bonne conduite aux pays d'Europe centrale et orientale. Depuis que le monde est monde, bien avant Monsieur de la Fontaine, la raison du plus fort est toujours la meilleure.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.