Cette si chère énergie nucléaire
Les sages de la rue Cambon relèvent qu'entre 2010 et 2013 le coût de production des 19 centrales nucléaires françaises a fait un bond de plus de 20% pour monter à 60 euros le kilowatt-heure contre un peu moins de 50 euros en 2010. Et la tendance n'a aucune raison de s'inverser au cours des prochaines années. Cela n’est pas de bon augure pour le gouvernement et pour la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal, qui vient de réaffirmer à plusieurs reprises sa volonté de maîtriser la facture des français.
Quels sont les arguments avancés par la Cour des comptes pour expliquer cette envolée des coûts de production du nucléaire ?
Principalement les dépenses d’exploitation d’EDF (achat de combustible, frais de personnels, de logistique), ainsi que les charges futures et les dépenses de maintenance qui vont continuer d’augmenter en flèche pour approcher les quatre milliards d’euros par an, en moyenne, jusqu’en 2025 (une hausse de 118%).
Seulement voilà, le prix du nucléaire reste malgré tout inférieur aux autres énergies. Cruel dilemme ! Produire de l’éolien et du solaire coûte cher (autour de 85 euros le mégawatt-heure pour l’éolien terrestre contre 60 euros désormais pour le nucléaire. Ce ne sont pas des énergies stockables et elles dépendent à 100% des conditions météo. Revenir à l’énergie fossile en utilisant le charbon bon marché importé des Etats-Unis ? Encore plus cher : entre 70 et 100 euros le mégawatt. Et puis nous voyons les résultats que cette politique donne en Allemagne qui a abandonné le nucléaire, rouvert ses centrales à charbon et vient de redevenir le pays le plus pollueur d’Europe (en nous arrosant au passage quand les vents viennent de l’Est).
Reste la transition énergétique
Cette transition ne peut se faire qu’en douceur. Impossible de basculer du jour au lendemain, même si la dernière enquête du cabinet Enerdata montre que les énergies renouvelables ont, pour la première fois en 2013, dominé les composantes du mix électrique en Europe (30% du total) devant le charbon et le nucléaire.
Objectivement, le rapport de la Cour des comptes apporte de l’eau au moulin des Verts. Après avoir invoqué la nécessité écologique, ils peuvent maintenant avancer l’impératif économique et social.
La Cour fait-elle des recommandations ?
Non, ce n’est pas son rôle. Elle laisse la parole aux techniciens. En revanche, elle envoie un message très clair au gouvernement : ce dernier doit se prononcer rapidement sur l’allongement ou non de la durée d’exploitation des réacteurs au-delà de 40 ans. Aux yeux de l’institution c’est le seul élément qui pourrait avoir un effet à la baisse sur le coût de production.
Il faut surtout permettre à Edf de trancher rapidement pour prendre ses décisions d’investissements. Tout cela ne se décide pas en un claquement de doigt. Les enjeux financiers sont très lourds, enjeux industriels également avec par exemple Alstom, partie prenante de notre stratégie nucléaire.
Sur tous ces dossiers, nous n’avons que trop tardé. Le temps du politique n'est pas celui de l'économie. Matignon, qui veut présenter son projet de transition énergétique en Conseil des ministres avant la fin de la session parlementaire, va devoir accélérer la cadence.
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