Bruxelles Pékin, la guerre solaire
Cette ''guerre du solaire'' est la plus importante bataille
commerciale jamais menée entre l'Union européenne et la Chine. La production
chinoise de panneaux photovoltaïques a quadruplé entre 2009 et 2011. Elle
dépasse désormais la demande mondiale. Les chinois contrôlent aujourd'hui un
peu plus de 80% du marché européen dont ils étaient pratiquement absents il y a
encore quelques années. En 2011, ils ont importé vers l'Europe pour 21
milliards d'euros de matériels. Du matériel bien moins cher que le notre grâce
à de moindres coûts salariaux (c'est le dumping social) et une monnaie (le
yuan) sous-évaluée. Les droits de douanes élevés à l'entrée de l'Union
européenne semblent s'être imposés comme la seule contrepartie efficace aux
visées hégémoniques de la Chine.
Tous les partenaires européens sont-ils sur la même
ligne ?
On verra ce que donneront les discussions entre les 27 pays
membres d'ici le 6 juin, date à laquelle la nouvelle taxe douanière doit entrer
en application. Mais des dissensions pourraient apparaître sur cette décision
conservatrice qui émane paradoxalement d'un des commissaires européens les plus
libéraux : Karel de Gucht. La Chine ne fait pas qu'importer des panneaux
solaires. Il y a aussi les composants qui, contrairement aux idées reçues,
gagnent de plus en plus en qualité et dont se servent les fabricants européens
de panneaux. Une taxe douanière prohibitive pourrait, in fine, leur porter
préjudice. Et puis il y a les intérêts bien sentis de certains pays. L'Allemagne
par exemple qui vend à l'Empire du Milieu ses machines-outils sur lesquelles
sont justement fabriqués les composants ensuite importés en Europe. Face à ces
enjeux importants, Paris et Berlin préfèreraient des accords politiques à des
sanctions douanières.
Sans compter les mesures de rétorsion que la Chine pourrait
prendre
Oui, car d'autres dossiers sont dans la balance : les
questions de droits de propriété intellectuelle ou la législation européenne
sur la pollution émise par les avions au départ et à l'arrivée de l'Union. Mais
Bruxelles pourrait jouer sur la corde la plus sensible du moment : Pékin
souhaite l'ouverture de négociations pour un accord de libre-échange avec
l'Europe, ce à quoi Bruxelles s'oppose. Conscientes de l'importance d'une telle
ouverture sur le monde, les autorités chinoises pourraient mettre en sourdine
certaines réactions hostiles pour ne pas faire capoter les discussions. Enfin,
Bruxelles ne doit pas oublier l'OMC. L'Organisation Mondiale du Commerce pourrait
considérer le projet de taxe européenne comme contraire aux règles du commerce
mondial. Si tel était le cas, les européens seraient contraints de s'asseoir
sur leurs ambitions et Pékin pourrait continuer à inonder la planète de
panneaux photovoltaïques bon marché. Tout sera donc question de négociations à
base d'énergie solaire... autant dire que les prochains mois s'annoncent très
chauds.
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