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La Fête de l'Huma dans l'Essonne : Pour le sociologue Jean Viard, "c'est une vraie tradition populaire, une institution de la République"

Le sociologue Jean Viard et Augustin Arrivé se demandent ce que la Fête de l'Huma, qui se tient dans l'Essonne jusqu'à demain soir 17 septembre, représente aujourd'hui pour la gauche.
Article rédigé par Augustin Arrivé
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
La Fête de l'Huma le 11 septembre 2022 avec la foule devant le chanteur Gauvain Sers. L'édition 2022 a accueilli quelque 450 000 visiteurs. (DENIS TRASFI / MAXPPP)

Comme chaque année, l'un des derniers festivals musicaux de l'été, la Fête de l'Huma se déroule jusqu'à demain soir, dimanche 17 septembre, sur l'ex-base aérienne 217 dans l'Essonne, entre Le Plessis-Pâté et Brétigny-sur-Orge. Ce soir, par exemple, concerts d'Imany, Acid Arab ou Martin Solveig. Au programme, de nombreux débats, de nombreuses rencontres et des discussions certainement animées. Le sociologue Jean Viard se demande ce que représente aujourd'hui cette Fête de l'Huma.

franceinfo : Avec près de 450 000 visiteurs l'an dernier, La Fête de l'Huma ne représente-t-elle pas – davantage que les universités d'été des partis – le grand rendez-vous d'expression de l'union de la gauche en France ?

Jean Viard : Alors, c'est quand même d'abord une immense fête culturelle et musicale. Je pense qu'il y a beaucoup de gens qui y vont s'en aller aux débats politiques, c'est la grande fête culturelle de la rentrée. Depuis 1930, c'est une vraie tradition populaire, c'est une institution de la République, si on peut dire, même si on a changé de lieu à cause des JO. La deuxième chose, c'est que Fabien Roussel est toujours aussi bon en com. Chaque fois, la semaine d'avant, il a un propos un peu extrémiste, donc tous les médias se précipitent dessus, et du coup, on ne parle que de la fête de l'Humanité.

Là, il parlait de l'envahissement des préfectures...

Ça, c'est de la politique de haut niveau, mais cela marche très bien, c'est la toile de fond. Et puis c'est un lieu où il y a beaucoup de groupes qui se sont exprimés, beaucoup de nouveaux groupes. Donc c'est un lieu vraiment de la vie culturelle française. L'année dernière, ils ont eu 450 000 entrées. Regardez le festival des Vieilles Charrues, par exemple, ils sont montés de 250 à 340 000. Donc, cette année, il y a énormément de public dans ce genre de manifestation. Il serait assez logique que ça leur profite aussi. 

Après, c'est une fête populaire, portée évidemment par le Parti communiste, mais je ne sais pas combien de gens savent exactement que c'est porté par le Parti communiste. Ce qui est sûr, c'est qu'il y a une partie politique très importante de débats, es gens sont là longtemps, l'ancien Premier ministre va débattre avec Fabien Roussel. Donc ce n'est pas que la gauche entre elle ; c'est considéré comme un des lieux du débat de la gauche avec la société.

Et c'est une richesse, ce brassage politique ? 

Évidemment, c'est une chance, c'est une richesse, c'est un lieu de débat. Même moi, je suis allé à la Fête de l'Humanité, il y a longtemps, quand c'était à La Courneuve. C'est un peu un lieu de mise en scène de la politique. Est-ce que c'est un lieu d'élaboration intellectuelle ? Je n'en suis pas sûr, mais en tout cas, c'est un lieu d'échanges, de dialogues. Il y a beaucoup de public dans les débats, donc c'est un lieu très vivant de la vie démocratique française. Donc, c'est un lieu positif.

La droite gagnerait-elle à trouver ce même genre de rendez-vous fédérateur ?

Vous savez, l'histoire du monde de la culture, c'est un lien privilégié avec la gauche, pour des tas de raisons. Mais on a toujours dit : la gauche, c'est l'alliance de ceux qui n'ont rien, et des intellectuels et des artistes, pour le dire vite. La droite, c'est l'alliance de ceux qui possèdent : les églises, les militaires, les capitalistes. Je schématise un peu le propos, ils n'ont pas le même lien avec la culture, alors ils pourraient faire des choses. Mais regardez, le Rassemblement national fait des choses qui n'ont pas du tout la même importance. Mais ils n'ont pas la même empathie avec les nouvelles musiques, les musiques des jeunes de banlieues, les rappeurs, ça ne fait pas très Rassemblement national tout ça.

Donc je pense que le lien culturel, historiquement, il est fondamentalement entre la gauche et les milieux culturels. Donc il peut y avoir des évolutions. Le milieu culturel évolue comme toute la société. Mais je pense que ça aura jamais cette espèce de fusion, qui est dans l'âme historique de la gauche.

La culture de droite, avec cette opposition entre deux chanteurs très populaires de deux générations différentes, ça a été un des débats de l'été, mais ça ne s'exprimerait pas forcément à travers un festival comme la Fête de l'Huma ? 

Oui, ce n'est pas la même chose, ce n’est pas la même ambiance. Y a le côté extrêmement populaire, le côté merguez frites. D'ailleurs, Fabien Roussel incarne ça très bien avec son discours sur la viande, etc. Quelque part, c'est le peuple, ça ne correspond pas tout à fait aux républicains, qui ont quand même un côté un peu 'collet monté'. Et le Rassemblement national est sur une logique beaucoup plus agressive.  Mais regardez le Puy du Fou, quand les gens y vont, est-ce qu'ils ont tellement l'impression de soutenir l'idéologie de Monsieur de Villiers ? Ce n’est pas entièrement sûr. C'est un peu la même chose de l'autre côté.

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