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Nouveau monde. Le nouvel algorithme de Facebook a-t-il favorisé le mouvement des "gilets jaunes" ?

Le changement d’algorithme du réseau social, en janvier dernier, aurait décuplé la mobilisation des mouvements de protestation en ligne.

Article rédigé par franceinfo, Jérôme Colombain
Radio France
Publié
La mobilisation des "gilets jaunes" se fait notamment par les réseaux sociaux. (PHILIPPE RENAULT / MAXPPP)

Pour comprendre, il faut remonter à janvier 2018. Il y a un an, Facebook a décidé de changer son algorithme de recommandation, cet ensemble de règles qui définit la manière dont les innombrables publications s’affichent sur le fil d’actualité ("newsfeed") de chaque utilisateur.

Officiellement, Facebook a expliqué ce changement par la lutte contre les fausses nouvelles et l’addiction (officieusement pour des raisons économiques). Le nouvel algorithme privilégie les interactions locales, entre famille et amis, au détriment des contenus provenant des médias qui avaient pris beaucoup de place.

Les messages de colère surreprésentés

En offrant plus de visibilité aux publications entre proches, le "nouveau" Facebook augmenterait ainsi la visibilité des messages de colère et aussi des "fake news", qui alimentent largement le mouvement des "gilets jaunes", et qui bénéficient de la dimension émotionnelle des réseaux sociaux.

Le site américain BuzzFeed News s’est penché sur ce phénomène et cite le cas de ces groupes de citoyens mécontents baptisés "Colère" qui sont apparus dans le Sud-Ouest en début d’année. Cétait, en quelque sorte, les prémisses des "gilets jaunes". Au début, le phénomène est passé quasiment inaperçu. Mais après le changement d’algorithme, en janvier, les pages des groupes "Colère" auraient soudainement bénéficié d’une visibilité accrue.

En privilégiant les interactions privées et locales, Facebook a donc pu contribuer à propager l’excitation alors même que l’objectif annoncé par le réseau social était inverse : donner la priorité à une "information fiable, informative et locale" censées favoriser le "bien-être" (sous-entendu : contrairement aux articles de presse). Autre paradoxe, "les gilets jaunes" pensent que Facebook les censure, alors que c’est faux et que c’est précisément l’inverse qui semble donc se produire.

Du côté de Facebook, on indique n’avoir pas constaté d’augmentation de ce type d’activités. Au contraire, selon la plateforme, le phénomène semblerait se nourrir des médias, comme en attesterait la profusion des références aux articles de presse dans les posts des "gilets jaunes".

Au final, difficile de mesurer l’impact réel de l’algorithme sur la mobilisation des "gilets jaunes" car, par ailleurs, le réseau a déployé les grands moyens afin de modérer les contenus ; notamment en faisant disparaître les appels à la violence et en diminuant la portée des fausses nouvelles. 

Il faudra sans doute du temps pour comprendre exactement ce qui s’est passé. Cela apparaît, en tout cas, comme une nouvelle illustration de l’influence grandissante, pas toujours maîtrisée, des réseaux sociaux dans la vie en société.

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