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Micro européen. Espagne, une situation politique chaotique

Quand l’Espagne a du mal à retrouver le chemin de l’équilibre politique. 

Article rédigé par franceinfo - José-Manuel Lamarque
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, le 11 novembre 2019 à Madrid (Espagne). (BURAK AKBULUT / ANADOLU AGENCY / AFP)

Le résultat des élections espagnoles, dimanche 10 novembre, a été sans équivoque. Si la droite nationaliste et son parti Vox ont fait un bond en avant, se plaçant comme la troisième force politique espagnole après ces élections législatives, la droite libérale quant à elle, le parti Ciudadanos, a explosé en plein vol, menant son chef, Alberto Rivera, à la démission et à une retraite politique.

Seul le parti nationaliste Vox a quasiment doublé sa présence au parlement espagnol avec 52 sièges 

Quant aux trois autres partis politiques espagnols qui font l’actualité depuis une bonne décennie, le PPE, le PSOE et Podemos, le parti de Pablo Iglesias, ce résultat législatif ne les conforte en rien. Le PPE, le Parti populaire a gagné 12 sièges au parlement espagnol, Las Cortes, sièges dont il a dû bénéficier par l’effondrement des libéraux, Ciudadanos, perdant 47 sièges.

Le PSOE, le parti socialiste espagnol, parti du premier ministre Pedro Sanchez, même s’il est considéré comme vainqueur de ce scrutin, n’en sort pas renforcé pour autant, ayant perdu 3 sièges. Quant au parti de la gauche radicale, Podemos, ce dernier se maintient avec 35 sièges au parlement. 

Le compte n’y est pas 

Ainsi les résultats de cette législative espagnole porte le parlement à 120 députés pour le PSOE, 88 pour le PPE, 52 pour Vox, 35 à Podemos et 10 pour Ciudadanos. Ces cinq formations politiques comptabilisent un total de 305 députés pour un parlement de 350 sièges. À n’en pas douter, les 45 restants feront la différence car ce sont des sièges qui reviendront aux petits partis et aux partis indépendantistes.

Ici se fera la différence pour Pedro Sanchez. C’est, peut-être, la raison pour laquelle Pedro Sanchez a proposé une coalition à Pablo Iglesias, le leader de Podemos. Ce premier pas vers une formation gouvernementale se fait entre "frères ennemis", comme si Pedro Sanchez voyait se réduire ses marges de manœuvres après ce quatrième scrutin législatif en quatre ans ! Parce que la formation de ce gouvernement ne pourra éviter l’impact des indépendantistes catalans.  

La cruciale question catalane  

Il est vrai que ce quatrième scrutin est aussi la cause de la question catalane non-résolue. La province la plus riche d’Espagne est aussi la plus turbulente, en ce début de XXIe siècle.

Si l’Espagne a connu la période du terrorisme basque avec ETA, l’Euzkadi, soit la province basque au sud des Pyrénées, ses pouvoirs, ses droits, et la marge de manœuvre de ses institutions basques face aux devoirs imposés par la constitution espagnole, conviennent pour l’instant aux deux parties soit Madrid et Vitoria (Gasteiz) capitale de l’Euzkadi. Il n’en va pas de même pour la Catalogne.

Si Barcelone s’est toujours positionnée comme la concurrente de Madrid, voire Madrid "inférieure" à Barcelone, ceci a toujours été possible grâce à la puissance économique et financière de la Catalogne, qui, même sous le franquisme, pratiquait la langue catalane alors que la langue basque était interdite.

Depuis la fin du XIXe siècle, la Catalogne a toujours été la province rebelle. Foyer de l’anarchisme en Espagne, la Catalogne du début du XXe siècle connaît des heurts de rue violents et nombreux avec l’autorité espagnole, et les Catalans étaient affublés du sobriquet de "pistoleros" par les Espagnols.

Il faut dire que le nationalisme catalan est une mosaïque de volontés indépendantistes basées, tout d’abord sur la langue et la culture catalane, puis, dispersées par diverses idéologies qui divisent la société catalane. L’échiquier politique catalan est aujourd’hui mené par la gauche radicale catalane républicaine, suivie par une partie de la Catalogne.  

Les jeux ne sont pas faits et rien ne va plus  

Aujourd’hui, l’Espagne est en attente de la constitution de son parlement, puis le Roi Felipe VI va devoir consulter les partis politiques pour la formation d’un gouvernement. Et cette consultation va se faire avec 16 partis politiques puisqu’il existe des partis nationaux et régionaux.

Pour l’heure, il serait évident que le Roi demande à Pedro Sanchez de former un gouvernement qui serait donc une coalition entre le parti socialiste espagnol et Podemos. Seulement, ce gouvernement va devoir passer les fourches caudines du parlement qui devra l’approuver ou pas. Ce qui veut dire que dans le calcul parlementaire des voix en faveur du nouveau gouvernement, Pedro Sanchez devra compter sur l’abstention du parti républicain de la gauche catalane, ce qui n’est pas encore fait, comme l’a signalé notre invité Juan Jose Durado.

Dans le cas contraire, le chaos politique espagnol perdurerait, amenant peut-être l’Espagne à de nouvelles élections législatives, les 5ème, (?) renforçant encore plus le parti nationaliste espagnol Vox ! Et pour autant, les indépendantistes ne lâcheront pas un pouce de terrain, tant que leurs élus condamnés et emprisonnés ne sortiront pas de prison. Soit un étau qui ne se desserrera pas de sitôt.  

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