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Les infox de l'Histoire : "L'Ukraine, une histoire instrumentalisée"
Le 21 février 2022, trois jours avant de lancer son armée à l'assaut de l'Ukraine pour justifier son agression, Vladimir Poutine Instrumentaliser l'histoire en niant l'existence d'un État, d'une nation et même d'une histoire ukrainienne indépendante de celle de la Russie, dont l'Ukraine s'était pourtant séparée 30 ans plus tôt en proclamant son indépendance le 24 août 1991. Patrice Gélinet analyse les faits aux côtés d'Alexandra Goujon, maîtresse de conférences à l'Université de Bourgogne, enseignante à Sciences Po Paris et spécialiste de l'Ukraine et de la Biélorussie.
Patrice Gélinet : L'Ukraine, qui a donc, à part une brève période de quatre ans entre 1918 et 1922, n'est devenue véritablement indépendante qu'en 1991, au terme d'une histoire compliquée pendant laquelle, successivement ou simultanément, les Polonais, les Turcs, les Autrichiens et les Russes se sont partagés des morceaux de ce qui est aujourd'hui l'Ukraine et l'Ukraine, aujourd'hui, est victime depuis deux ans d'une agression russe justifiée par Vladimir Poutine, ayant l'existence d'un véritable État avant 91, affirmant que l'Ukraine et la Russie ont une histoire commune qui remonte très loin puisque, selon lui, selon certains, serait la mère de toutes les villes russes, que c'est à partir de la capitale de l'actuelle Ukraine que se serait construite la Russie.
Alexandra Goujon : Alors en fait, il faut savoir que Kiev ou ce qu'on appelle aussi la Rus' de Kiev au Moyen âge, d'abord, elle est créée par des Scandinaves, par des Varègues qui sont des Vikings qui s'installent le long du Dniepr, et qui vont progressivement ouvrir des comptoirs et créer une capitale autour d'un Empire avec plusieurs principautés et où vivent des slaves qui vont ensuite donner les Ukrainiens, les Biélorusses et les Russes. Donc il y a bien une histoire commune. Le problème que l'on a avec Vladimir Poutine, c'est que cette histoire est commune, mais elle doit être dominée par la Russie. Donc on reste dans un principe impérial, colonial, de soumission de petits peuples avec une hiérarchie parmi les peuples slaves.
Alors c'était un immense Etat, la Rus' de Kiev. Est-ce que c'est à cause de ça qu'on appelle la Russie comme cela ?
Oui, ça vient de ce mot qui était au départ en fait plutôt un mot d'origine scandinave, dont ont tire le mot Russie, a aussi une origine grecque. Et sur la Rus' de Kiev, il y a vraiment plusieurs interprétations. Ça pourrait être un mot d'origine scandinave russe qui peut vouloir dire aussi rameur, puisqu'en fait ces Varègues sont descendus le long des fleuves.
La Rus' de Kiev était un des Etats les plus grands d'Europe, sinon le plus grand, puisque ça allait de la Finlande jusqu'à la mer Noire. Il est né à la fin du 9ᵉ siècle et disparaît trois siècles plus tard, au début du 13ᵉ siècle, victime des guerres qui opposent les principautés qui la composent et surtout des invasions mongoles qui occupent le sud de l'Ukraine, tandis que le nord est intégré pendant plus de trois siècles au royaume de Pologne. Cette partie de l'Ukraine, d'ailleurs, qui était en partie l'Ukraine, a été plus longtemps sous la domination des Polonais que des Russes.
Tout à fait. En fait, les premières révoltes ukrainiennes au 17ᵉ siècle, elles sont tournées plutôt vers la Pologne. La domination polonaise, c'est une rébellion contre la Pologne. Et d'ailleurs, c'est ce qui va emmener en fait un certain nombre d'Ukrainiens à s'allier avec la Russie pour lutter contre cette domination polonaise. Et en fait, l'Ukraine va être vraiment ballotée pendant très longtemps entre domination polonaise et domination russe.
Avec "Les infox de l'Histoire", la troisième saison du podcast de la Fondation Descartes en partenariat avec franceinfo, voyagez à travers les époques au cœur des grands épisodes de désinformation. Patrice Gélinet et ses invités exposent et analysent les infox qui ont défrayé la chronique de l'antiquité à nos jours. Complotisme, désinformation, rumeurs, calomnies, emballements médiatiques… Une troisième saison de huit épisodes pour décrypter les mensonges de l'Histoire.
Producteur : Patrice Gélinet
Réalisatrice : Gilles Blanchard
Documentaliste/Attachée de production : Juliette Marcaillou
Technicien : Marie Lepeintre
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