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Le vrai du fake. Une fausse publicité raciste et la traque des réfugiés nord-coréens en Chine

Vrai ou fake ? Marie Colmant et Antoine Krempf passent au crible deux infos repérées sur le web et les réseaux sociaux.

Article rédigé par Antoine Krempf - Marie Colmant
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Kim Jong-Un et un exemple de tweet sur la publicité de Dove jugée raciste par des internautes. (AFP)

Le fake : une fausse publicité raciste

Depuis quelques jours, une publicité jugée raciste est largement dénoncée sur les réseaux sociaux et particulièrement sur Facebook. Des captures d'écran d'une publicité de Dove (une marque de cosmétiques) créent la polémique. On y voit une femme noire soulever son tee-shirt, le retirer et c'est alors une femme blanche qui apparaît. Selon les internautes, la marque sous entend que la femme noire est sale et qu'avec un peu de savon elle pourrait devenir normale, c'est-à-dire blanche.

Des centaines de messages indignés ont donc été publiés sur les réseaux sociaux ainsi que des appels au boycoot de la marque de cosmétiques. Dove, de son côté, retire la publicité en question et s'excuse en expliquant, en substance, avoir été mal compris. Le groupe assure aussi qu'il va revoir toute sa politique de création et de validation de ces campagnes de communication.

Sauf que l'histoire est beaucoup plus compliquée que ça parce que les captures d'écran partagées sur Facebook ne sont en fait qu'un extrait d'une publicité de Dove. Dans la version intégrale, on voit une femme noire enlever son tee-shirt pour faire apparaître une femme blanche, qui elle même retire son haut, pour se transformer en femme à la peau mate. Cette publicité a également été déclinée en spot de 30 secondes pour la télévision américaine avec sept femmes différentes. En ne retenant que les deux premiers mannequins, une femme noire qui se transforme en femme blanche, on est donc proche de la manipulation.

Le mannequin noir qui apparaît dans la publicité, Lola Ogunyemi, a écrit une tribune dans le quotidien britannique The Guardian pour dire qu'elle regrette la mauvaise interprétation de cette pub, qu'elle n'y a rien vu de raciste et qu'on aurait aussi pu retenir que la marque a décidé de mettre son visage en premier dans cette campagne de communication.

Problème : Dove n'en est pas à sa première polémique sur ses publicités. Un premier scandale avait déjà éclaté en 2011. Une publicité montrait à l'époque deux panneaux : le premier représente une peau sèche, avec la mention "avant", le second une peau hydratée avec l'inscription "après". Trois mannequins sont alignés devant ces tableaux : une femme noire pose devant le panneau "avant", un mannequin métis entre les deux tableaux et une femme blanche devant le panneau "après". Un slogan accompagne le tout : "Avec Dove, une peau visiblement plus belle".  La marque expliquait déjà avoir été mal comprise et assurait que les trois femmes étaient censées illustrer les bénéfices de leur produit et pas une évolution entre elles.

Le vrai : la Chine et Pyongyang unis pour traquer les réfugiés nord-coréens

Plus de 20 000 Nord-coréens ont tenté de quitter leur pays durant ces dix dernières années. La plupart voulaient gagner la Corée du Sud. Pour cela, ils traversent la frontière commune avec la Chine, longue de 1 600 kilomètres, avant de passer en Thaïlande et de finalement atteindre la Corée du Sud. Ce périple prend au total six semaines. C'est à partir de la première halte chinoise que les réfugiés se mettent en contact avec le réseau clandestin mis en place par des réfugiés sud-coréens, qui les aident depuis plus de vingt ans à quitter la Corée du Nord. 

Mais, depuis l’été dernier, ces réfugiés font face à un nouvel obstacle de taille. La police chinoise développe de plus en plus sa surveillance vis-à-vis de ces fuites clandestines. Jusqu'ici, Pékin raccompagnait les réfugiés nord-coréens jusqu'à la frontière sino-coréenne. Les policiers chinois sont passés à la vitesse supérieure, selon Human rights watch et les ONG sud-coréennes. Il n'y a plus de contrôle au hasard mais de véritables raids policiers dans toutes les régions frontalières pour traquer les évadés. Ces opérations ne font pas dans le détail puisque les policiers arrêtent au passage des villageois susceptibles, selon eux, d'avoir aidé les réfugiés. Quarante et un évadés nord coréens, parmi lesquels une douzaine d’enfants, ont ainsi été retrouvés par la police chinoise puis secrètement détenus, avant d’être remis aux autorités nord-coréennes.

Les autorités chinoises vont même encore plus loin, grâce à des espions du régime de Kim Jong-Un qui campent dans deux hôtels chics situés dans deux villes chinoises, à quelques kilomètres de la frontière. Ils se font passer pour des touristes ou des hommes d'affaires nord-coréens et utilisent ce lieu stratégique pour collecter des informations. Pour ce faire, ils n’hésitent pas à mettre sur écoute les citoyens chinois ou sud-coréens de la région qu’ils soupçonnent d’aider les réfugiés. Munis de ces renseignements, ils lancent alors des opérations de récupération sur le territoire chinois. On dit que Kim Jong-Un ne supporte pas les dissidents, qui, selon, lui, ternissent l’image de son pays et qu’il l’aurait fait savoir à Pékin en plus haut lieu. On peut donc se demander pourquoi Pékin a cédé aux injonctions de Kim Jong-Un d’une main, tout en soutenant les nouvelles sanctions américaines contre la Corée du Nord. 

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