Jérôme Cahuzac dit-il vrai sur les partenariats public-privé ?
Vrai.
Un mot d'explication sur ces
partenariats public-privé (PPP). Il s'agit de contrats passés entre un
organisme public (État ou collectivité territoriale) et un groupe privé pour le
financement, la construction et parfois l'exploitation d'infrastructures : voirie, prison, hôpital,
stade. La puissance publique verse ensuite, et parfois pendant 20 ou 30 ans, un
loyer au constructeur (ou bien celui-ci se rémunère sur les recettes d'exploitation, dans le cas d'un stade par exemple).
La formule présente quelques
avantages non négligeables.
Déjà, cela permet d'aller plus vite. Ou encore de monter des projets complexes,
surtout pour des collectivités qui n'ont pas forcément l'expertise technique
pour le faire. Mais le véritable atout de ces PPP, c'est qu'ils permettent de "planquer" de la
dette sous le tapis : car un loyer n'apparaît pas sur la ligne "endettement" d'un bilan. Pratique pour un élu qui s'est engagé à ne pas endetter sa
commune, ou pour l'État qui doit réduire le poids de son endettement.
Effet anesthésiant
Le premier danger, c'est de se laisser aller à la dépense car il n'y a pas de
choc de l'investissement. "La collectivité ne supporte pas directement sur son budget les dépenses d'investissement, et n'a pas à contracter elle-même les emprunts nécessaires", explique le président de la Chambre régionale des
comptes des Pays-de-Loire, Louis Vallernaud. Attention à "l'effet anesthésiant" du PPP, qui peut du coup pousser un peu plus à la dépense, car sur 20 ou 30 ans c'est relativement indolore.
Mais l'inconvénient principal d'un
PPP, c'est qu'au final, il revient plus cher. Beaucoup plus cher.
L'exemple le plus emblématique est celui de l'Hôpital Sud-Francilien, le plus
gros jamais construit en France : un millier de lits, 20 blocs opératoires, cinq
pôles de soin. Le bâtisseur, c'est le groupe Eiffage. Le contrat prévoit 30
loyers annuels de plus de 40 millions d'euros chacun. Dans 30 ans, cet hôpital aura donc coûté un milliard 200 millions d'euros.
Rapport au vitriol
Un gouffre financier que décrit la Cour des comptes. Car le recours à une maîtrise
d'ouvrage publique aurait permis d'économiser 500 millions d'euros, plus de 40 % (une simulation d'emprunt de 344 millions d'euros — le devis du projet — sur 30 ans donne un coût de 757 millions d'euros, selon la CDC).
Et surtout de conserver la main sur les coûts de fonctionnement de l'hôpital,
ce qui ne sera pas le cas.
Alors, comme le dit le ministre du
Budget Jérôme Cahuzac, après avoir eu le vent en poupe, ces partenariats
public-privé pourraient bien avoir "le vent dans le nez." La Cour des comptes est en train de finaliser
un rapport sur ces PPP : un rapport qui s'annonce au vitriol.
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