Proche-Orient : derrière le slogan "De la rivière à la mer", trois visions politiques radicalement antagonistes

"De la rivière à la mer, la Palestine sera libre" : scandé lors des manifestations propalestiniennes, le slogan est aussi assumé par les partisans d'un Etat binational et par les mouvements israéliens d'extrême droite.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Une manifestante brandit le slogan "De la rivière à la mer, la Palestine sera libre", lors d'une manifestation à Rome (Italie) le 14 mai 2024 (ANDREA RONCHINI / NURPHOTO)

C’est un slogan qu’on entend sur beaucoup de campus à travers le monde dans les manifestations propalestiniennes, et qui fait polémique : "De la rivière à la mer, la Palestine sera libre". La rivière c’est le fleuve Jourdain, qui sépare à l’est la Cisjordanie occupée de la Jordanie ; la mer c’est la Méditerranée, à l’ouest d’Israël.

Entre les deux, Il y a donc l’Etat hébreu et ses colonies, illégales au regard du droit international : la Cisjordanie, administrée en partie par l’Autorité palestinienne mais amputée d’une partie de son territoire et toujours sous le contrôle d’Israël, et la bande de Gaza, dirigée par le Hamas depuis 2007, et en guerre depuis plus de sept mois. Trois espaces, trois pouvoirs, trois religions aussi et deux peuples qui partagent moins de 30 000 km².

Un slogan interprété très diversement

Comme souvent dans la région, chacun y met ce qu’il veut. Pour un certain nombre de juifs, la formule masque l’antisionisme voire l’antisémitisme des manifestants : une Palestine "libre de la mer au Jourdain" signifierait la fin de l’Etat d’Israël, et induirait l’anéantissement des juifs. Pas besoin de vous rappeler que le pays a été créé après l’horreur de la Shoah et que ses habitants ont vécu le 7 octobre un des pires pogroms de leur histoire.

Du côté palestinien, ce slogan est né dans les années 60 symbolisait au moment de la création de l’Organisation de Libération de la Palestine l’idée d’un Etat libre, laïc et démocratique sur des terres qu’environ 700 000 Arabes ont été contraints de fuir lors de la création d’Israël en 1948. Il a ensuite été récupéré, d’abord par le Hamas, qui prône la destruction d’Israël, mais aussi par les partisans d’un Etat unique, binational, où cohabiteraient juifs et Arabes.

Trois visions politiques aux antipodes et qui pourtant s’appuient sur les mêmes mots. Pour encore ajouter un soupçon de complexité, il y a aussi des partisans juifs d’un Etat qui irait de la mer au Jourdain : ce sont les alliés d’extrême droite du Premier ministre Benyamin Nétanyahou. Ils ont un rêve et ils l’expriment haut et fort : recoloniser Gaza et les terres bibliques de ce qu’ils appellent la Judée Samarie, autrement dit la Cisjordanie occupée et donc jeter les bases d’un Etat juif qui s’étendrait lui aussi... "de la mer à la rivière".

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