OTAN : que va changer l'intégration de la Suède au sein l'Alliance atlantique ?

Deux ans après le dépôt de sa candidature, liée à l'invasion russe en Ukraine, la Suède est formellement entrée, jeudi dans l'OTAN. Elle en devient le 32e pays membre et va pouvoir profiter de la protection de l'Alliance.
Article rédigé par franceinfo, Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Le secrétaire d'État Antony Blinken ( à droite) reçoit les documents de ratification de l'OTAN des mains du Premier ministre suédois, Ulf Kristersson, à Washington, le 7 mars 2024. (ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP)

Pour Stockholm, c'est un changement historique, en intégrant officiellement l'Otan, jeudi 7 mars, le royaume met fin à une neutralité qui remonte aux guerres napoléoniennes et qui s'est prolongée à la fin de la Guerre froide par la doctrine de non-alignement militaire. La Suède n'a pas connu de conflit depuis 1814 ! Changer de braquet après deux siècles de constance c'est quand même un symbole.

La Suède est donc maintenant "mieux protégée contre le mal russe", a dit Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, qui espère suivre l'exemple. Elle va désormais pouvoir profiter de la protection de l'Alliance, via l'article 5 et mettre ses propres forces au service du collectif.

Une militarisation progressive

La Suède ne part pas de zéro. Même si elle n'a pas de frontière terrestre avec la Russie, ses côtes ne sont qu'à quelques encablures de l'enclave de Kaliningrad. L'annexion de la Crimée, il y a dix ans a fait office de déclic. La Suède a compris qu'elle devait se préparer à se défendre. Depuis dix ans donc, ses dépenses militaires augmentent.

L'Otan demande à ses membres de consacrer au moins 2% de leur PIB à la défense ? La Suède va largement les atteindre cette année alors que beaucoup d'adhérents historiques n'y sont pas encore.

Le pays a une armée de 50 000 soldats, dont la moitié de réservistes. Mais pour 10 millions d'habitants le ratio est très important. Là encore, la Suède ne part pas de zéro. Elle a l'habitude de collaborer avec l'Otan Depuis dimanche elle participe d'ailleurs à un grand exercice militaire en Laponie. 20.000 soldats, 13 pays différents. Il s'agit de tester leur capacité à se coordonner face à un ennemi commun.

Outre sa candidature à l'OTAN, la Suède a signé en décembre un accord autorisant les États-Unis à avoir accès à 17 bases militaires sur son sol.

Ce que la Suède apporte à l'OTAN ? Une position stratégique face à la Russie.

La Suède dans l'OTAN, c’est la dernière pièce du puzzle, qui manquait en Europe du Nord. L'Alliance contrôle désormais presque toute la mer Baltique, qui sur son flanc oriental borde les pays baltes (ils sont trois, n'oubliez pas): Estonie, Lettonie, Lituanie, en position frontale avec Moscou. Jusqu'ici, ils couraient le risque de se retrouver isolés face à une éventuelle attaque des forces du Kremlin.

De manière générale, l'adhésion de la Suède, encore inimaginable il y a trois ans, renforce l'Alliance, qui devient "une force assez impressionnante avec la puissance combinée de 32 pays, de la Turquie au sud jusqu'au Svalbard" au nord, décrivait le chef de l'armée suédoise, Jonny Lindfors, au journal Dagens Nyheter en décembre 2023. Une consolidation nécessaire après les dernières menaces de Donald Trump contre l'Alliance.

"Trop de sacrifices"

Le Premier ministre suédois, Ulf Kristersson, déclarait dès janvier que son pays était prêt à fournir des troupes aux forces de l'OTAN en Lettonie. La Suède apporte aussi l'île de Gotland, située entre les côtes suédoises et la Lettonie, remilitarisée depuis 2018.

Une majorité de Suédois estime que leur pays a fait de "trop de sacrifices" pour devenir membre de l'OTAN, selon un sondage de la radio SR, mais ils reconnaissent que la sécurité de la Suède s'est renforcée. Pour Antony Blinken, le secrétaire d'État américain, "il n'y a pas de meilleur exemple pour démontrer la débâcle stratégique qu'est devenue pour la Russie son invasion de l'Ukraine".

La menace des contre-mesures russes

Helsinki et Stockholm avaient annoncé en même temps leur candidature pour rejoindre l'OTAN en 2022. Si le processus d'adhésion de la Suède a été ralenti par des tractations avec la Turquie, qui l'accusait de trop de mansuétude envers des militants kurdes réfugiés sur son sol, et la Hongrie, la Finlande a pu adhérer en avril 2023. Moscou avait alors menacé Helsinki de "contre-mesures"... et la Finlande avait dû faire face à un afflux de migrants à sa frontière orientale. Le même avertissement a été adressé la semaine dernière à la Suède. On ne sait pas quelles formes cette fois prendront ces "contre-mesures". Lundi, comme un signe de résistance, le drapeau suédois bleu et jaune sera hissé devant le siège de l'OTAN à Bruxelles.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.