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Mégafeux : la lettre d’une Américaine, ex-pompier, aux autorités canadiennes

Les incendies ne cessent de dévorer les forêts canadiennes. Le pays reçoit depuis plusieurs jours l’aide internationale. Une femme pompier américaine à la retraite a, quant à elle, écrit une tribune pour tenter de comprendre ce qui se passe.
Article rédigé par Elise Delève
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Un feu de forêt dans la province du Quebec au Canada, le 14 juillet 2023. (ANTHONY ROLLAND / SOCIETE DE PROTECTION DES FORETS via AFP)

Depuis le début de l'année, dix millions d’hectares ont brûlé au Canada, soit l'équivalent de la taille du Portugal. Des pompiers venus des États-Unis et d’Europe s’activent actuellement pour calmer les centaines d’incendies qui ravagent le pays. De l’autre côté de la frontière, aux États-Unis, une femme observe avec tristesse la nature se déchaîner. Cette femme, c’est Clare Frank. Sur le site de CNN, elle a écrit jeudi une lettre  "honnête au Canada". Clare est la première femme pompier devenue cheffe en charge de la protection des feux en Californie. Aujourd’hui à la retraite et auteure de Burnt : a memoir of fighting fire, elle a mis ses 30 années d’expérience à profit pour analyser ce qui se passe chez son voisin.

Pour Clare Frank, le Canada a commis plusieurs erreurs qui conduisent aujourd’hui à ses mégafeux. La première, c’est que, écrit-elle, nous n’avons pas réussi à faire cohabiter la nature et les constructions humaines. Ceux qui donnent l'autorisation de construire, ne sont pas ceux qui sont tenus responsables en cas de catastrophe naturelle, note-t-elle.

Pire, quand il y a un incendie, au lieu de laisser la nature guérir, on reconstruit, déplore-t-elle. Un pays fait cependant mieux que les autres selon elle : l’Australie. Depuis 1996, il existe un "Code pour les zones soumises aux incendies de brousse". Pour construire dans ces zones, il faut obligatoirement utiliser des matériaux spéciaux, comme des toitures et une isolation résistante aux feux et aux intempéries, des restrictions très onéreuses. Clare Franck conseille au Canada de suivre ce modèle.

Davantage de préventions

Clare Frank estime par ailleurs que les sociétés – c’est vrai au Canada, aux États-Unis et en Europe – n’ont pas réussi à créer une "intolérance culturelle à l'égard des comportements imprudents". Que ceux qui déclenchent les incendies ne sont pas assez punis.  

Côté prévention, il faut plus qu’un panneau "S’il vous plait, faites attention", s’insurge la femme pompier. Aux USA 80% des feux de forêts sont déclenchés par négligence, en France c’est même 90%. Au Canada, c’est plus équilibré, les incendies sont moitié d’origine humaine et moitié d’origine naturelle, surtout à cause de la foudre

L’aide des autochtones

Il y a peut-être deux pistes pour améliorer l’avenir. D’abord arriver à optimiser les moyens à l’échelle du pays. Au Canada, il n’existe pas de service national de lutte contre les incendies et autres catastrophes naturelles. C’est chaque province qui gère ses moyens, son budget, ses appels à l’aide. Le mois dernier, le Premier ministre Justin Trudeau a évoqué l’idée de la création d’une Agence nationale, équivalent de la "Federal Emergency Management Agency" (Fema) aux États-Unis. Pour l’instant cette idée n’a pas séduit. 

Autre piste : impliquer d’avantage les populations autochtones. Elles veulent être formées à la prévention des incendies, et aussi à leur extinction. En somme : demander à ceux qui ont toujours été proches de la terre de devenir les gardiens du territoire.

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