Corée du Sud : des étudiants lésés de 90 secondes lors d'un examen portent plainte contre le gouvernement
On a tous connu ça : la sonnerie qui retentit, le prof qui crie : "Fin de l'épreuve, posez vos stylos !" Et vous, qui vous accrochez à votre feuille pour gratter quelques secondes en plus, écrire à toute vitesse les derniers mots qui manquent à votre phrase, ric rac avant qu'on vous arrache la copie des mains d'un geste intransigeant.
En Corée du Sud aussi, les étudiants connaissent ce genre de stress, d'autant qu'ils sont très à cheval sur la ponctualité. La BBC (qui reprend l'agence de presse Yonhap) nous apprend qu'à Séoul, 39 lycéens qui ont passé l'examen d'entrée à l'université, il y a un mois, ont porté plainte. Ils réclament 20 millions de wons, soit 14 000 euros (chacun) pour préjudice, au motif que, sur la première épreuve de la journée, qui était la langue coréenne, la cloche a sonné 90 secondes avant la fin du temps réglementaire. 14 000 euros c'est le montant des frais engagés sur une année, puisqu'ils estiment devoir repasser l'examen l'an prochain.
Face à leurs protestations, les enseignants ont pourtant essayé d'arranger les choses. Avant le début de l'épreuve suivante, ils ont rendu les copies aux candidats et ils leur ont donné 1 minute 30 pour qu'ils puissent terminer ce qu'ils avaient à faire. Ça n'a pas suffit. Les candidats étaient tellement chamboulés qu'ils ont été incapables de se concentrer sur la suite des épreuves, soutient leur avocat. Certains ont même abandonné et sont rentrés chez eux. Comment 90 petites secondes peuvent vous amener à rater votre examen, à faire dérailler votre orientation, voire à ruiner votre carière professionnelle...
Un système hyper-compétitif
Il faut prendre conscience que cet examen, le "Suneung", fait partie des plus difficiles au monde dans un système éducatif ultra-compétitif. Les élèves s'y préparent depuis leur premier jour d'école. Leur classement va dicter leur avenir en déterminant leur université, leur lieu de résidence, leurs futures relations sociales, leur métier... Les conglomérats comme Samsung, Hyundai ou LG où l'on peut faire toute sa carrière recrutent dans les meilleurs établissements - auxquels on n'accède que si on a bien réussi son "Suneung".
L'enjeu est celui de toute une vie, au point que, pour ne pas déconcentrer les élèves, ce jour-là, les avions restent cloués au sol, les magasins sont fermés, les chantiers arrêtés, les horaires des entreprises modifées. Et pendant que les candidats transpirent, les parents qui ont dépensé des fortunes en cours particuliers (en moyenne 300 euros par mois et par enfant) passent la journée à prier au temple bouddhiste pour que tout se passe bien.
Ces étudiants qui ont porté plainte ont des chances de gagner, parce que ce n'est pas la première fois qu'un tel événement se produit. En avril, un tribunal de Séoul a accordé environ 5 000 euros à des lycéens qui affirmaient avoir été lésés en 2021 parce que la cloche avait sonné environ deux minutes trop tôt. De quoi donner des idées aux bacheliers français ?
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