Au Mozambique, des jihadistes revendiquent la prise d’une ville entière
La menace jihadiste gagne le sud du continent africain. Au Mozambique, "les Shebab", qui ont fait allégeance à l’État islamique, viennent de revendiquer la prise de la ville portuaire de la Palma.
Nous sommes en Afrique australe, sur le littoral, au bord de l'Océan indien, juste en face de l'archipel des Comores. Un petit port de la région au Mozambique, Palma, 75 000 habitants, s'est transformé en quelques jours en ville fantôme depuis que les jihadistes ont pris le contrôle de la ville. Ses habitants se sont enfuis par dizaines de milliers, certains à pied, pour aller se mettre à l’abri dans le bush, d’autres en pirogues. Il y a des corps décapités laissés dans les rues, plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de morts, impossible de donner un bilan précis, les autorités ont perdu le contrôle.
Ni l'armée ou la police, qui sont sous-équipées, ni les milices d’autodéfense qui pourtant se préparaient à une invasion, n’ont pu résister aux jihadistes qui ont encerclé la ville et lancé leurs premières attaques mercredi dernier. Plusieurs milliers de personnes ont malgré tout réussi à se réfugier sur le gigantesque site gazier géré par Total à une dizaine de kilomètres de Palma, tranformé en "sorte de Fort Apache" ultra-sécurisé.
Un groupe jihadiste ultra-violent
Les jihadistes sons issus d’un groupe de Mozambicains et de Tanzaniens qui se fait appeler "Al-Shabab" ("les jeunes" en arabe) et qui prône l'instauration de la charia. On ne sait pas précisément qui sont leurs dirirgeants. Les autorités ont sous-estimé leur capacité de nuisance. Ils sont longtemps restés dans l'ombre avant de monter en puissance et ces trois dernières années. Ils revendiquent pas moins de 700 attaques ultra-violentes qui ont fait 2 600 morts et plus d'un demi-million de déplacés. Leur méthode : incendies, pillages, décapitations et enlèvements. Leur rayon d’action se situe dans cette province de Cabo Delgado, majoritairement musulmane, l'une des les plus pauvres du Mozambique malgré ses immenses richesses naturelles.
C'est dans cette région que les jihadistes recrutent en s'appuyant sur la colère et le désœuvrement des jeunes, qui voient leur échapper les revenus de l'exportation gazière. Les shebabs, qui ont récemment fait allégeance à l’organisation État islamique ont pris le contrôle d'un port en août dernier, et sont aujourd'hui maîtres d'une bonne partie de la zone côtière. Depuis le mois de décembre, les attaques s'étaient d'ailleurs rapprochés du site gazier. Une zone "d'au moins 25 km autour du complexe" devait être sécurisée par les autorités, sans succès.
Un pays dépassé
La menace islamiste en Afrique est perçue comme essentiellement concentrée à l’ouest du continent, au Mali et au Burkina Faso. C'est dans cette région qu'est sa branche la plus puissante, elle a quasiment levé une armée de professionnels. Elle a aussi ses franchises sur les bords du lac Tchad, au Niger, au Nigéria et au Cameroun. Mais l’Afrique de l’Est et l'Afrique australe ne sont pas épargnées.
On connaît le mouvement "Al Shabab", lié à Al Qaida, qui existe depuis longtemps en Somalie. Voici maintenant les shebabs du Mozambique, l'un des plus gros défis de toute la sous-région de ces dernières années. Conquérir un territoire est une chose, l'administrer en est une autre, on ne sait pas ce que vont faire ces combattants précisément. Le pays est tellement dépassé qu'il a du faire appel à des sociétés privées et des mercenaires pour tenter de reprendre la contrôle de sa région nord, sans succès.
Jusqu'ici les États voisins, au premier rang desuqles l'Afrique du Sud, ont refusé d'envisager toute intervention militaire. Le Mozambique commençait à peine à se relever d’une longue guerre civile qui a pris fin au début des années 1990 - cette guérilla pourrait mettre en péril les espoirs de développement.
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