Attaque de l'Iran contre Israël : les Ukrainiens jugent les soutiens occidentaux asymétriques
L'attaque iranienne qui s'est produite dans la nuit du 13 au 14 avril contre Israël résonne d'une façon très particulière en Ukraine. Les drones, lancés par l'Iran, sont les fameux Shahed-136, repérables à leur silhouette triangulaire, en forme d'aile delta, et à leur vrombissement de moteur de mobylette (en tout cas pour les premiers modèles). Ce bruit, qui résonne désormais à la fois dans le ciel ukrainien et dans le ciel du Moyen-Orient, est "un signal d'alarme", selon Volodymyr Zelensky.
Ces drones bon marché sont "l'instrument de deux régimes qui cherchent à répandre la terreur", explique le chef de l'Etat (ils sont apparus à l'automne 2022, quand Téhéran et Moscou ont annoncé renforcer leur coopération militaire).
Selon le dirigeant ukrainien, les actions de l'Iran - comme celles de la Russie - menacent toute une région. Et les actions de l'Iran - comme celles de la Russie - peuvent nous entraîner "dans un conflit encore plus vaste". Une agression face à laquelle les Occidentaux doivent donc apporter une réponse "résolue et unie".
Les Ukrainiens jugent en effet le soutien occidental asymétrique : 99% des missiles et des drones lancés dans la nuit de samedi à dimanche ont été abattus grâce au Dôme de fer, pilier stratégique de l'alliance entre Israël et les États-Unis.
Pour se défendre, Israël a aussi reçu de l'aide de la France, du Royaume-Uni et de la Jordanie, qui ont mobilisé des technologies d'interception ultra-coûteuses... alors qu'aucun accord de défense ne les y obligeait. Et sans qu'aucune capitale ne mette en avant la fameuse "co-belligérance" si souvent avancée sur le terrain ukrainien par les plus réticents à agir.
Un "deux poids deux mesures" mal vécu
"Voilà le modèle de solidarité et de défense qu'on aimerait voir chez nous", disent plusieurs Ukrainiens contactés ce dimanche 14 avril par Whatsapp. Beaucoup dénoncent un "deux poids deux mesures". Pourquoi ces pays ne feraient-ils pas preuve du même engagement en Ukraine, alors que le pays ne cesse de leur demander plus de soutien face à l'agresseur russe ?
Kateryna est chanteuse et musicienne. Ukrainienne. Et Juive par sa grand-mère. Sa mère et sa sœur sont en ce moment en Israël. Son neveu, officier promis à un brillant avenir dans l'armée, est mort en janvier lors d'une opération spéciale à Gaza. Prise entre deux conflits qu'elle n'aurait jamais imaginés, samedi la jeune mère de famille n'a pas fermé l'œil de la nuit. "Soit tu ne dors pas à cause des Shahed qui arrivent vers ta maison en Ukraine, soit tu ne dors pas à cause des infos qui concernent Israël", raconte-t-elle.
"On est toujours comme des mendiants"
"Mais c'est impressionnant de voir comment Israël réussit à protéger son peuple. Par exemple, ma mère n'a absolument rien entendu dans la nuit. J'aimerais bien que l'Ukraine puisse avoir un tel potentiel... Mais on est toujours un peu comme des mendiants, on demande en tendant la main : est-ce qu'on peut avoir un peu d'armes ? C'est injuste", dit Katia.
Injuste que les alliés de Kiev ne fassent pas davantage. Injuste que les Américains ne votent toujours pas l'enveloppe de 61 milliards de dollars d'aide, vitale pour Kiev mais bloquée au Congrès par une poignée d'élus républicains.
L'Ukraine a par exemple besoin de systèmes Patriot pour protéger l'ensemble du pays. L'Allemagne lui en a cédé un ce samedi, mais Kiev n'en possède actuellement qu'une poignée... alors qu'il en existe une centaine à travers le monde. Le "signal d'alarme" évoqué par le Volodymyr Zelensky résonne toujours plus fort dans le ciel ukrainien.
Chronique réalisée dans le cadre d'un déplacement en Ukraine organisé par le groupe de réflexion Eastern Circles
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