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À Goma, en République démocratique du Congo, la fuite des habitants sous le feu du volcan

Scènes de panique depuis jeudi 27 mai autour de la ville de Goma. Le volcan Nyiragongo est entré en éruption. C'est le sauve-qui-peut général.

Article rédigé par Isabelle Labeyrie
Radio France
Publié
Temps de lecture : 4min
Des habitants de Goma s'inscrivent afin de recevoir une aide. Ils ont fui la ville à cause de l'éruption du Nyiragongo, le 26 mai 2021. (GUERCHOM NDEBO / AFP)

En quelques minutes ils ont rassemblé leurs affaires, improvisé des baluchons et pris la route de l'exil. Dès l'ordre d'évacuation, donné jeudi 27 mai pour 10 quartiers, c'est toute la capitale qui a commencé à fuir : 600 000 personnes, familles, enfants, vieillards, se sont précipités sur l'axe de sortie de la ville, à l'opposé des coulées de lave. Dans la confusion la plus totale : embouteillages de véhicules surchargés, coups de klaxons, flot ininterrompu de personnes à pied le long de la route,  le tout sous le regard impuissant de rares militaires et policiers.

La plupart de ces réfugiés ont passé la nuit à la belle étoile, dans des églises ou des écoles de la ville de Saké, une vingtaine de kilomètres plus à l'ouest, ou au Rwanda, juste de l'autre côté de la frontière, pour échapper à ce que les autorités qualifient de "risque de catastrophe majeure".

On ne parle pas uniquement de nouvelles coulées de lave comme celles de ce week-end qui ont déjà fait une trentaine de morts et détruit entre 900 et 2 500 habitations, mais de la présence de centaines de millions de mètres cubes de magma en train de se propager sous terre, à une profondeur estimée entre zéro et 4 km au-dessous du niveau de la mer, sous la ville mais aussi sous le lac Kivu qui la borde. Signe possible d'une éruption sans préavis, alors que la terre continue de trembler plusieurs fois par jour. L'une des secousses hier atteignait 4,9 de magnitude sur l'échelle de Richter avec des coulées de lave à 100 km/h.

Une éruption d'autant plus dangereuse que la zone est extrêmement peuplée : les faubourgs de Goma remontent très haut sur les pentes du Nyiragongo, volcan le plus dangereux de tout le continent africain.

Ses coulées de laves sont tellement fluides qu'elles peuvent descendre à près de 100 km/h : rien ne les arrête et surtout pas les maisons de bric et de broc qui se trouvent sur leur passage. C'est ce qui s'est passé lors de la dernière éruption en janvier 2002. Déjà, lors de la précédente, en janvier 1977, 2 000 personnes étaient mortes en seulement une demi-heure.

Risque d'éruption limnique

L'autre risque, c'est une éruption sous le lac Kivu. Dans le jargon des spécialistes, on apelle ça "une éruption limnique". Cela se produit quand le magma réchauffe les eaux du lac. Le dioxyde de carbone, présent en grande quantité dans les profondeurs, remonte alors à la surface et se retrouve projeté dans l'atmosphère.
(Dans le cas du lac Kivu, lac "tectonique", il y aussi du méthane. Une composition particulière au Grand Rift, ensemble géologique d'Afrique de l'Est constitué de failles de volcan riches en gaz).
Or le dioxyde de carbone a beau être inodore et incolore, ils est extrêmement toxique : au-delà d'un taux de concentration de 15% dans l'atmosphère, il est même mortel. L'asphyxie des êtres vivants est immédiate et foudroyante. Ce qui voudrait dire des milliers de morts à plusieurs kilomètres à la ronde en quelques minutes - sauf à équiper toute la population en en masques à oxygène.

Ce scénario catastrophe, on le craignait déjà il y a 20 ans. En 2002 toutefois, le pire ne s'était pas produit. Ce type de catastrophe, extrêmement rare, a surtout frappé le Cameroun, où le retournement du lac Nyos a tué près de 1 800 habitants et décimé plusieurs milliers de têtes de bétail en 1986.
Ce scénario du pire n'est pas le plus probable aujourd'hui. Une équipe d'experts est tout de même montée jeudi au sommet du volcan, sur les bords du cratère, "pour évaluer les risques".

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