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Lucien Jean-Baptiste à l'affiche du film "La Traversée" : "Je le dis aux parents : trouver la passion de vos enfants !"

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, l’acteur, réalisateur, scénariste et doubleur voix, Lucien Jean-Baptiste. Ce mercredi 29 juin 2022, il est à l'affiche du film de Varante Soudjian, "La Traversée", avec Alban Ivanov.

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Le réalisateur, scénariste et acteur Lucien Jean-Baptiste, au festival de Cannes en 2022. (FRED DUGIT / MAXPPP)

Lucien Jean-Baptiste est un touche à tout. Il est acteur, réalisateur, scénariste et il est aussi très connu dans le doublage. Il est la voix française de Chris Rock, de Martin Lawrence, d'Ice Cube et l'une des voix de Will Smith ou encore de Jamie Foxx. Ses films, La première étoile, Dieumerci ! ou encore Il a déjà tes yeux, ont marqué les esprits. Une belle victoire pour lui, d'autant plus que tous ses films sont empreints de son histoire personnelle.

Ce mercredi 29 juin 2022, il est à l'affiche du film La Traversée, de Varante Soudjian, avec Alban Ivanov. Il joue un éducateur de quartier qui emmène cinq ados déscolarisés dans une traversée de la Méditerranée, pendant 15 jours, afin de les réinsérer par le biais des valeurs de la mer.

franceinfo : Ça démarre assez mal pour les cinq adolescents parce que le skippeur, Riton, est un ancien de la BAC. C'est un vrai regard finalement sur les préjugés qu'on peut avoir les uns sur les autres.

Lucien Jean-Baptiste : Oui. Varante Soudjian et Thomas Pone, qui ont écrit ce scénario, ont eu cette bonne idée de prendre des ingrédients sociétaux : la police, les jeunes en quête de futur, etc... Et de mettre tout ça dans le même bateau, au milieu de la Méditerranée plutôt que d'avoir les flics dans un commissariat et les jeunes en bas d'une tour HLM. Le point de départ ne pouvait que me donner envie d'y aller.

Capitaine, c'est ce que vous êtes devenu à travers ce film. J'ai l'impression que c'est un rôle qui vous a toujours accompagné.

Oui. C'est marrant parce que tout ça a commencé, finalement, quand j'étais jeune. J'habitais dans une cité et pour me payer mes petits plaisirs, j'étais moniteur. Donc c'est vrai que j'ai emmené pas mal de gamins à la montagne, en balades, etc... J'ai été confronté à cette réalité. C'est resté une espèce de vocation, celle d'essayer d'apporter ce qu'on peut aux autres.

C'est quoi le déclic, le coup de foudre pour votre métier ?

Au départ, gamin, j'étais peut-être comme un de ces gamins. Une situation familiale pas simple, avec du bonheur, avec de la dignité, mais avec peu d'argent. J'avais dit dans mon troisième film que souvent, en banlieue, on enterre nos rêves de gosses dans les terrains vagues, c'est-à-dire que quand j'étais petit, je voulais être comédien ou interprète. Et puis, vous tombez sur ces fameux conseillers d'orientation qui dit à vos parents : "Non, votre fils fera un très bon mécanicien ou un très bon comptable". Et puis vous l'écoutez, surtout quand ce même conseiller d'orientation dit à votre maman que dans deux ans, elle aura un salaire en plus. Alors j'ai essayé de faire des études bon an mal an.

Que vous avez réussi !

Oui, j'ai réussi, j'ai eu un BTS de pub. Et après, à 30 ans, j'ai décidé de changer de vie suite à un drame familial. Je me suis dit, 'écoute, il faut vivre ses rêves !'et je suis allé m'inscrire au fameux cours Florent.

Au cours Florent, pour la première fois de ma vie, je n'ai pas couru après l'argent, j'ai couru après la passion et j'ai trouvé finalement ce pour quoi j'étais fait.

Lucien Jean-Baptiste

à franceinfo

Et puisse ce film ouvrir les yeux à certains jeunes qui pensent que c'est foutu ! Ce n'est pas rap ou foot : non, il y a d'autres perspectives !

Il y a eu Caméra Café, puis après il y a Emmenez-moi. Il y a une vraie évolution.

Moi, je fais tout. Théâtre, cinéma, doublage, télé, tout. C'est comme si j'étais quelqu'un de gourmand qu'on lâchait dans une pâtisserie. Et là, vas-y, éclate-toi, "Lulu et la chocolaterie" ! Il faut tout faire pour trouver sa passion. Je le dis aux parents : trouver la passion de vos enfants !

Je voudrais qu'on parle du doublage. C'est vrai que ça occupe une grosse place dans votre vie et que cela vous tient beaucoup à cœur.

Oui, on en parle mal du doublage. On en parle mal tout le temps. Il y a un sentiment comme si c'était une espèce de parent pauvre de ce métier, mais vous êtes fou ! C'est un vrai métier parce que quand vous doublez, je vais prendre DiCaprio pour changer de couleur, le gaz qu'il envoie est payé dix millions de dollars pour jouer les rôles, pour mettre de l'émotion. Et vous, vous êtes comédien de doublage, vous arrivez et n'avez même pas un quart d'heure pour regarder la scène et y aller. Il faut donc vraiment avoir de vrais talents de comédien.

Il y a le Lucien Jean-Baptiste qui devient acteur et puis celui qui a eu envie après, de se lancer dans ses propres films. C'est comme ça que va naître La première étoile, un succès colossal.

La motivation d'un premier long métrage, c'est l'envie de raconter une histoire, l'envie de partager quelque chose, l'envie de dire : ‘Il y a toujours une solution’.

Lucien Jean-Baptiste

à franceinfo

Génial ! C'était surtout raconter comment on fait pour apporter du rêve à ses enfants quand on n'en a pas les moyens. Et, au-delà de ça, alors attention sortez les mouchoirs, n'ayant jamais connu mon père, j'ai essayé d'imaginer un père nul, mais présent. C'est tout ça ce film. C'est aussi une histoire d'immigration. Le squelette de ce scénario, c'est le monde blanc et comment se fondre dans ce beau décor. C'est pour ça que dans ce film, il y a la chanson, de Jean Ferrat, La Montagne parce que les premières paroles de cette chanson sont : "Ils quittent un à un le pays pour s'en aller gagner leur vie, loin de la terre où ils sont nés. Depuis longtemps, ils en rêvaient de la ville et de ses secrets, du formica et du ciné". Voilà, si ça, ce n'est pas un parcours d'immigration, alors qu'est-ce que c'est ?

Vous avez toujours ce côté force tranquille ?

Ah non, je ne suis pas la force tranquille. Je crois que je suis hyperactif. Très sincèrement, je suis très heureux de ce qui m'arrive, de cette espèce de bonheur, de passion qui m'agitent au quotidien. Je me réveille, je me dis: tu as déjà la pêche, et ouais ! Je vais faire des films, je vais rencontrer des gens, je vais aller à franceinfo donc je suis shooté dès le matin. Certains pensent que je prends des trucs : je ne prends rien du tout, à part du plaisir !

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