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"Le fait de m'évader de la vie, du réel" : les confidences de Christian Clavier sur son métier d’acteur

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le comédien et producteur, Christian Clavier. Ce mercredi 28 juin 2023, il est à l'affiche du film "Les Vengeances de Maître Poutifard" de Pierre-François Martin-Laval.
Article rédigé par franceinfo, Elodie Suigo
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Publié
Temps de lecture : 7min
Christian Clavier, lors de la cérémonie des César, en 2021. (THOMAS SAMSON / POOL/AFP)

Christian Clavier est l'un des acteurs les plus emblématiques du cinéma français, acteur mais aussi scénariste et producteur. C'est au café-théâtre que sa bande d'amis au sein de la troupe du Splendid a été révélée avec des films devenus cultes comme Le Père Noël est une ordure de Jean-Marie Poiré (1982) ou Les bronzés font du ski de Patrice Leconte (1979), portés par plusieurs générations. Puis il y a eu des films devenus incontournables avec des rôles comme celui de Jacquouille la Fripouille dans Les Visiteurs (1993), L'opération Corned-Beef (1991) ou encore Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre (2002). Impossible de ne pas citer son rôle de Thénardier dans Les Misérables à la télé en 2000 ou de Napoléon Iᵉʳ dans Napoléon (2002).

Ce mercredi 28 juin 2023, il est à l'affiche du film Les Vengeances de Maître Poutifard adapté du livre de Jean-Claude Mourlevat par Pierre-François Martin-Laval.

franceinfo : Dans Les Vengeances de Maître Poutifard, vous êtes cet instituteur à la retraite qui n'a qu'une seule idée en tête, c'est de se venger de ses anciens élèves qui l'ont empêché d'être un homme heureux et donc qui lui ont gâché sa vie. Ce qui semble vous avoir vraiment séduit, c'est ce côté Comte de Monte-Cristo.

Christian Clavier : Oui, la vengeance. C'est-à-dire qu'il subit, c'est une victime. Ce type est une victime de sa mère qui est effrayante et qui lui bouffe sa vie et puis de ses élèves qui sont infects, absolument infects et qui vont très, très loin dans la méchanceté et qui ont, du coup, un résultat catastrophique réel sur sa vie. C'est extraordinairement intéressant parce que c'est un sujet tragique qui ne fait pas du tout un film pour enfants et c'est ça qui est plaisant. Après, c'est l'univers de Pef qui vient se greffer là-dessus, c'est-à-dire un univers extrêmement coloré.

Qui vous a beaucoup séduit !

Que je connaissais des Profs (2013). Je lui fais confiance, il est un très bon metteur en scène, je sais qu'il va y avoir du burlesque, des gags mais intégrés à l'histoire. Et Isabelle Nanty qui joue ma mère, mais absolument épouvantable. Donc ces trois raisons-là ont fait que je me suis dit : c'est très intéressant de foncer dans cette aventure.

Vous allez rencontrer vos camarades de jeu, Gérard Jugnot et Thierry Lhermitte, à l'école. Vous avez toujours été un très bon élève.

Non, je n'ai pas toujours été très bon élève.

Vous avez eu le bac avec mention !

Oui, oui, à la fin, j'étais bon élève, ça m'intéressait. Certaines matières m'intéressaient.

Vous avez commencé Sciences-Po, mais le métier d'acteur vous a attrapé.

J'ai commencé Sciences-Po parce que c'était plus pratique d'être étudiant à l'époque. Je n'ai jamais vraiment voulu faire Sciences-Po. On voulait tous se retrouver pour faire du théâtre. Je dirais que Sciences-Po est une bifurcation très rapide, mais les gens prennent ça parce qu'ils se disent : "Oui, le type est moins con que ce qu'il en a l'air", mais en fait, ce n'est pas vrai.

Pourquoi pensez-vous que les gens pensent cela de vous ?

Parce qu' il y a une forme de bourgeoisie conventionnelle dans le fait des études, alors que c'est vraiment ce métier qui m'a donné la culture.

"C'est en jouant Molière, Feydeau que j'ai pris le goût de la langue, des situations, des grands auteurs de la culture et de la tradition française. Beaucoup plus qu’avec l'apprentissage de ça à l'école."

Christian Clavier

à franceinfo

Très vite, effectivement, il y a ce plaisir que vous aviez en commun tous ensemble de jouer. C'est un amusement. C'était un plaisir de se retrouver.

Ce n'était pas seulement le fait de jouer et d'être contents d'être ensemble, c'était d'en faire un métier. C'est beaucoup plus important que ça. Il fallait que je prouve à mon père que j'allais en vivre. On a pris la décision d'essayer de faire un métier dans le seul secteur où il y avait vraiment du chômage, à l'époque, vous voyez comme ça faisait plaisir à nos parents.

"On a fait du théâtre contre la volonté familiale pour essayer de se prouver qu'on était capable d'en faire un boulot."

Christian Clavier

à franceinfo

Qu'est-ce que vous apporte alors ce métier d'acteur ?

Le fait de m'évader de la vie, du réel. J'apprends des choses, j'ai lu des choses. Vous voyez, le rôle de Thénardier, c'est extraordinaire de lire Victor Hugo. Avec Napoléon, c'est absolument passionnant de comprendre comment l'Europe se fait à partir de la Révolution. Ce sont des débats que vous entendez en permanence et qui sont passionnants et ça permet d'apprendre. C'est très intéressant de savoir ce que mangeait Napoléon !

Il y a un petit clin d'œil d'ailleurs dans ce film.

Oui, parce qu'il a mis un truc comme ça. Mais bon... Souvent, on me demande : "Vous vous souvenez de telle réplique du Père Noël ?" Je ne me souviens de rien, même pas des Visiteurs à part du "Ok" parce que c'est un mot. J'aime bien être à fond dedans. Je ne vois jamais les films que j'ai fait.

Depuis le début ?

Une seule fois parce qu'il faut voir si ça fonctionne, comment ça a été. J'essaie de le voir en salle avec vous comme spectateur, parce que ça me renseigne sur l'histoire. J'arrive à voir l'histoire, mais me regarder ne m'a jamais été d'un grand plaisir.

Les Français, en tout cas, vous ont adopté au fil du temps. Vous faites partie de leurs souvenirs. Ça vous touche d'être sur la photo de famille ?

Oui, énormément. Je ne suis pas du tout blasé de ça. Je suis extraordinairement flatté, honoré de ça. J'ai fait ce métier parce que j'avais une passion pour des acteurs qui avaient justement cette dimension-là. Faire partie de la famille française est une chose très importante.

Pour terminer, quel regard avez-vous sur ce que vous avez déjà accompli ? Est-ce que vous êtes heureux ? Est-ce que ce parcours coïncide avec l'homme que vous êtes ?

Je ne pensais pas faire un tel parcours. Je serais mal embouché de ne pas être content de ce parcours. Je n'en tire pas forcément une vanité incroyable. Je ne me sens pas du tout supérieur à qui que ce soit et je n'ai pas le sentiment d'avoir, bizarrement, un destin exceptionnel alors que pour les trois quarts des gens, oui, c'est exceptionnel d'avoir fait une carrière comme ça, d'être toujours dans le cinéma en ayant commencé à 20 ans et en ayant l'âge que j'ai, puisque j'ai 102 ans ! Et donc, c'est formidable d'avoir autant de films et d'être aussi en forme à mon âge. Pourquoi ? Vitamines et sport !

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