Carmen Maura bouleversante en professeure de musique dans la pièce : "L'Hirondelle"
Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, la comédienne espagnole, Carmen Maura. Elle est actuellement sur la scène du théâtre Hébertot dans la pièce : "L'Hirondelle" avec Grégori Baquet.
Carmen Maura est une actrice espagnole, notamment connue et reconnue pour ses rôles de femmes courageuses dans les films du réalisateur exigeant, Pedro Almodovar, dont elle est l'égérie. On se souvient de : Femmes au bord de la crise de nerfs (1989), La Loi du désir (1988) ou encore Volver (2006). Actuellement, elle est sur scène, à Paris, après trente ans d'absence, au Théâtre Hébertot, avec un rôle en français. La pièce s'appelle : L'Hirondelle.
franceinfo : Cette pièce raconte la rencontre entre une mère, prof de chant, qui vient de perdre son fils et un jeune homme (Grégori Baquet) qui le connaissait. Il va lui raconter plein de choses qu'elle n'a pas forcément envie d'entendre. Vous l'avez déjà joué en Espagne, cette pièce vous colle à la peau ?
Carmen Maura : En Espagne, cela a été très beau, on a eu beaucoup de succès, les gens étaient très émus, alors je me suis dit : ça fonctionne tellement bien, pourquoi pas l'emmener là-bas ? Ça a été formidable. Je crois que les deux semaines que j'ai pris pour passer de l'espagnol au français, ça a été un des moments les plus difficiles de ma carrière, vraiment. Je devenais folle. Parler le mieux possible en français avec tous ces mots, "pero" (mais) j'y suis arrivée comme si j'étais à l'école.
Vous avez commencé très tôt le français à l'école !
À la crèche, on nous parlait déjà un peu en français. Et après, il y avait toujours des petites filles françaises qui venaient chez nous les étés pour nous parler en français. À mon époque, quand j'étais petite, l'anglais, ce n'était pas bien et le chic pour les filles bien élevées, c'était le français. J'ai toujours aimé cette langue.
J'ai l'impression que vous êtes : Française de cœur ! Ce n'est par hasard si vous avez été adoptée par le public français. On vous a vu, notamment, dans Le bonheur est dans le pré (1995) et puis c’est avec "Les femmes du 6è étage" que vous recevez ce César incroyable de la meilleure actrice dans un second rôle en 2012.
Ce César de la meilleure actrice dans un second rôle a été incroyable parce que je n'y croyais pas du tout. En réalité, je n’avais qu’un petit rôle dans le film : "Les femmes du 6ème étage" et on me l'a donné, j'étais très surprise.
Carmen Mauraà franceinfo
Une des plus belles surprises dans ma vie. J'aime beaucoup jouer, mais tout ce qui entoure le jeu, ce n'est pas mon truc. Je ne suis pas très sociable. Je n'aime pas beaucoup les fêtes. Un endroit plein de monde, ça m'angoisse un petit peu, "pero" (mais) jouer, j'adore !
Cette envie de jouer est arrivée très vite dans votre vie. A quel moment ça bascule et que vous vous dites : "Je veux faire ça" ?
Moi, j'ai commencé à faire de pièces avec mes amis à l'école vers sept, huit ans. Je dirigeais, j'écrivais et non, je n'ai jamais pensé à être comédienne professionnelle parce que dans ma famille, ce n'était pas ça. Ce n'étaient pas des parents qui t'emmènent au théâtre, pas du tout. Je me suis mariée et j'avais mon groupe amateur. J'avais déjà une petite fille et un bébé. Et mon groupe s'est arrêté alors j'ai regardé les petites annonces : "On cherche des semi-professionnels". Je me suis présentée. A l'époque, j'avais une galerie d'art et sans rien dire à personne, j'y suis allée. On m'a prise tout de suite.
Quand j'ai été en contact avec les gens qui étaient professionnels, je me suis rendu compte que j'étais douée pour ça, que j'avais beaucoup de facilité. Alors un jour, je suis rentrée chez moi et je l'ai dit à mon mari et là, j'ai eu la nuit plus horrible de ma vie parce qu'il m'a dit : "Tu es folle, tu es trop vieille", j'avais 25 ans et en plus, j'étais enceinte. C'était la première fois de ma vie qu'on me disait : "Non" à une chose que je voulais alors que toute ma vie, j'avais fait ce qu'on me disait de faire. Ça a été un peu dur. Je n'avais pas des ambitions comme comédienne, je ne pensais pas que je serais une comédienne de cinéma.
D'ailleurs, vous avez commencé par le cabaret et le théâtre amateur avant que le cinéma rentre dans votre vie. Vous êtes à ce jour l'une des sept actrices à avoir reçu le Prix national de cinéma du ministère espagnol de la Culture. Vous avez joué avec et pour Francis Ford Coppola, ou encore Amos Gitaï, Alejandro Agreste, Etienne Chatiliez et Philippe Le Guay, Yasmina Reza. Quel est votre regard sur cette carrière ?
La chance fait beaucoup dans ce métier parce que tu ne peux pas savoir si tu es vraiment une bonne comédienne de cinéma, si tu n'es pas un jour la protagoniste dans un joli rôle.
Carmen Mauraà franceinfo
J'ai eu beaucoup de chance. Il y a une chose dans la carrière d’un comédien qui est difficile, c'est que la chance compte beaucoup. Il faut être positif et être détendu. Il faut ne pas penser à arriver dans un endroit, ça ne sert à rien et si ça se passe, ça se passe.
Vous avez souvent joué des rôles de femmes en crise, mais très solides, très fortes.
Parce que j'essaie toujours qu'elles soient fortes.
C'est aussi une demande que vous avez ?
Je ne dis pas aux metteurs en scène : je veux qu'elles soient comme ça ou comme ça, mais après, quand le rôle arrive entre mes mains, je lutte pour les défendre. Chaque femme que je fais... Par exemple, dans ma dernière série en Espagne, je joue une femme mauvaise comme on ne peut pas imaginer, elle est horrible. J'ai fait des folles, des schizophrènes et surtout, j'ai beaucoup tué au cinéma !
Vous avez mis 30 ans à revenir en France. Le fait d'y remonter sur scène, de retrouver ce public français qui vous attend depuis si longtemps, c'est un moment d'émotion ?
Je crois qu'il ne m'attendait pas. J'ai reçu un très beau cadeau, c'est Grégori Baquet, sur scène. Je crois que c'est ma meilleure expérience théâtrale et je m'amuse beaucoup.
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