Bruno Podalydès : "Les tourments du monde m'accablent aussi, mais j'essaye de résister par l'humour"
Bruno Podalydès forme avec son frère, l'une des fratries les plus connues du cinéma français. Il faut dire que ce n'est pas un hasard s'il est devenu scénariste, réalisateur et acteur. Son père, pharmacien, tournait des westerns dans leur salon. De ces réalisations improvisées, il en gardera que la conviction est la plus belle des armes, si on l'associe à la passion. Il a fait de cette transmission un métier et un moyen de rester tout le temps avec son frère, envers et contre tout. Son premier film, Versailles Rive-Gauche, en 1992, a été très remarqué, tout comme son court métrage Voilà, en 1994, sélectionné à la Mostra de Venise et puis il y a eu la réalisation d'Adieu Berthe, l'enterrement de mémé (2012) qui a remporté un énorme succès. Aujourd'hui, il est de retour avec La Petite Vadrouille avec Sandrine Kiberlain, Daniel Auteuil, mais aussi son frère Denis Podalydès.
franceinfo : La Petite Vadrouille nous fait penser à Gérard Oury et à Louis de Funès. L'humour semble être le socle de votre existence et de ce que vous avez envie de mettre en avant ?
Bruno Podalydès : L'humour toujours là pour nous accompagner au travers de cette traversée difficile qu'est la vie. Avec Denis, ce qui nous a unis très tôt, c'est le spectacle. C'est le côté faire le noir d'abord, des gens se déplacent, vendre les billets, le rideau rouge, le décor. Et au cinéma, ça continue. Dans La Petite Vadrouille, il y a encore un côté très théâtral que Denis et moi, on aime beaucoup.
On parle du couple, on parle de la famille, on parle aussi de l'importance de la confiance. Que vouliez-vous raconter avec La Petite Vadrouille ?
J'ai l'impression que si je ris de quelque chose et ou si je partage un rire, on comprend cette chose assez profondément, assez instinctivement et que ça suffit.
"Si je fais du cinéma, c'est quand même plus pour montrer que pour dire."
Bruno Podalydèsà franceinfo
En 2003, le film était presque né puisque c'est à ce moment-là que vous avez commencé à faire des petites virées familiales, fluviales et à vous rendre compte que vous pouviez passer d'un endroit à un autre assez facilement en pilotant des petites péniches. C'est le point de départ ?
Oui, le choix du cadre, le fait de naviguer en bateau vous impose un rythme de lenteur absolument assumé. On ne dépasse pas les cinq nœuds et puis il y a tout le temps des écluses à passer. Au début, on se dit : "Ça avait être un poème" et finalement ç'en est un, mais au bon sens du terme. On apprend à progresser, à regarder un canal. À chaque paysage, à chaque bief, comme on dit, entre deux barrages, de manière un peu nouvelle, on en profite.
Il y a inévitablement de la poésie dans ce film. C'est un ensemble d’amis. Il y a un couple au milieu qui a besoin de faire de l'argent et ils vont proposer à un investisseur, de lui organiser une virée romantique parce qu'il veut séduire une femme. J'ai l'impression qu'il y a une vraie symbiose même sur le lieu de tournage. Comment dirigiez-vous vos comédiens dont vous faites aussi partie ?
Je les drive comme je drive une péniche, c'est-à-dire en douceur. Cette bonne ambiance est propice au fait de jouer au bon sens du terme.
"Mon but, c'est que les comédiens soient à l'aise pour ne pas hésiter à oser, à en faire trop. Je n'ai pas trop envie de me contenter qu'on soit justes. J'ai envie que ça soit un peu plus intense, comme une comédie doit l'être."
Bruno Podalydèsà franceinfo
Je suis un bon enfant. On a aussi toute cette chanson française à laquelle je fais appel à chaque film, surtout en pensant à ma mère, une professeure d'anglais qui continue à beaucoup chanter. Et du côté de l'imitation des films, ce qu'on faisait avec notre père, ces premiers gestes de cinéma, c'est effectivement de courir dans l'appartement comme si c'était un western sur grand écran.
La poésie, c'est aussi l'un des ingrédients de ce que vous proposez. Il y a toujours un côté un peu clownesque, le nez rouge, le clown blanc aussi par moments. Ça, c'est un ingrédient essentiel ?
On croit être malin et original, mais on retombe souvent sur des vieux schémas de comédie ou du burlesque. Moi, j'ai compris en plein tournage que le fait que je sois un capitaine tout en blanc, j'étais le clown blanc et j'étais entouré d'Auguste.
Versailles Rive-Gauche, Dieu seul me voit (1998) et Bancs publics (2008) sont nés de votre éducation. On sent qu'elle vous a, d'abord, donné envie de croquer l'humain. Vous restez toujours intrinsèquement humain, soucieux de ce qui se passe dans nos vies.
Je me dis humblement que la réalité a plus d'imagination que nous, scénaristes. Et donc je puise... Par exemple, si on voulait croquer la radio, la télévision au cinéma, je trouve qu'on en est vite caricatural. Si je viens dans votre studio, je vais essayer de regarder les petits détails qui font que ce lieu existe avec sa singularité et le côté à la fois comique ou sa face cachée, enfin, ce qui fait qu'on sent que la vie passe par là.
Quand j'ai fini de regarder La Petite Vadrouille, je me suis demandé si par moments vous étiez sérieux ou pas.
Les tourments du monde m'accablent aussi, mais j'essaye de résister par l'humour. Forcément, même quand je dis ça, je suis déjà trop sérieux.
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