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"Azincourt par temps de pluie", le nouveau roman de Jean Teulé : une bataille imperdable perdue par la noblesse française

Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Aujourd’hui, le romancier et auteur de bande dessinée, Jean Teulé. Il publie, aujourd’hui, un nouveau roman : "Azincourt par temps de pluie" aux éditions Mialet-Barrault

Article rédigé par franceinfo - Elodie Suigo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
L'écrivain Jean Teulé à Metz (Moselle) le 12 avril 2018 (PASCAL BROCARD / MAXPPP)

Jean Teulé est romancier et auteur de bande dessinée. Artiste aux multiples facettes, il est primé en 1990 pour sa "contribution exceptionnelle au renouvellement du genre de la bande dessinée" à Angoulême, ce qui lui donne envie d'arrêter ! Il fait ses premiers pas à la télévision avec Bernard Rapp, dans l'émission L'assiette anglaise, puis travaille à Canal Plus dans l'émission Nulle part ailleurs, avant de signer son premier roman en 1996, Rainbow pour Rimbaud.

Mercredi 2 février, sort son nouveau roman : Azincourt par temps de pluie, aux éditions Mialet-Barrault. L'occasion de plonger dans cette bataille ô combien sanglante qui a eu lieu le 25 octobre 1415, pendant la guerre de Cent Ans.

franceinfo : Dans cette bataille, il y avait d'un côté, 30 000 Français et de l'autre, beaucoup moins d’hommes dans l’armée du roi d'Angleterre, Henry V. Elle est restée le symbole de la fin de l'ère de la chevalerie. Vous avez toujours cette écriture cinématographique.

Jean Teulé : Mais oui, c'est ça. Dans les livres que j'avais lu sur Azincourt, il y avait 200 pages pour expliquer le contexte politique, pour raconter les conséquences et puis finalement, la bataille était assez résumée et moi, j'avais envie de faire le contraire. Je voulais commencer le livre la veille de la bataille, le jeudi 24 octobre 1415, quand les dernières troupes françaises arrivent, et terminer le livre le lendemain de la bataille, c'est-à-dire le samedi. Qu'on ait l'impression d'y être et de voir comment s'organisait un truc comme ça.

"Cette bataille d’Azincourt est incroyable, c'est le symbole de la bêtise, de la prétention de la noblesse française. C'est une bataille qui n'aurait pas dû avoir lieu. Il n'y avait rien à gagner, il n'y avait aucune raison."

Jean Teulé

à franceinfo

En gros, c'est une bataille folle et ça tombe bien parce que le roi de France, à l'époque, était fou. Charles VI, on l'appelait Charles le Fol. Il se croyait en verre. Il se faisait mettre des attelles sur les bras, sur les jambes, des cerceaux autour de la poitrine et refusait qu'on le touche de peur qu'on le brise.

Henri V, le jeune roi d'Angleterre, quand il a appris que le roi de France était fou, a décidé d'envahir la France. Il est arrivé à l'embouchure de la Seine. Il voulait remonter la Seine, par Harfleur, pour prendre Paris et prendre la France. Sauf que rien ne s'est bien passé pour lui. Harfleur a résisté beaucoup plus que prévu. Il pleuvait, il pleuvait. Toutes les vivres que Henri V avait apportées pour son immense armée de 20 000 hommes, ont pourri. 12 000 soldats sont morts.

Le 8 octobre, il se dit : "OK, c'est planté, ça ne marche pas, maintenant, on arrête les frais, on remonte à fond la côte jusqu'à Calais et on retourne en Angleterre et basta". Et au moment où ils partent, tout d'un coup, les Français se réveillent, forment une immense armée, qui pourchassent les Anglais qui passent par l'est et qui leur bloquent le passage à 70 km de Calais, à Azincourt. Les Anglais ne comprenaient pas, en se disant : "C'est quand on est arrivés qu'il fallait nous attaquer. Pas quand on part !". Et tout ce qu'ont fait les Français, c'est un chapelet de conneries les unes derrière les autres.

"30 000 Français en cuirasse, en pleine forme, contre 5 000 Anglais malades. Les Français se sont faits laminer. Toute la chevalerie française a disparu dans cette bataille. 6 000 nobles."

Jean Teulé

à franceinfo

Ils étaient tellement sûrs de leur victoire, tous les choix qu'ils ont fait étaient un tissu de conneries. Normalement, quand on lit ce livre, on doit se dire : "Mais ce n'est pas possible, ils n'ont pas pu être aussi cons !"

On comprend mieux pourquoi William Shakespeare l'a énormément utilisée et célébrée dans "Henry V" !

Et ce qui est fou, c'est que les Anglais n'y croyaient tellement pas qu'encore maintenant, ils fêtent la bataille d'Azincourt. Et j'ai appris après la fin du livre, un truc qui est formidable – ils sont quand même marrants, les Anglais – c'est qu'en ce moment, ils sont en train de construire un sous-marin nucléaire. Et comment ils vont l'appeler ? Azincourt !

Vous êtes devenu un peu historien, vous nous relatez des faits, des époques, des moments, des personnages qui ont compté, vous qui n'aimiez pas l'école. Votre parcours est un vrai message d'espoir aussi.

Oui. Et à propos des écoles, quand j'allais dans des écoles, devant les profs, les élèves venaient me voir et me disaient : "Monsieur, si c'était vous qui nous donniez des cours d'histoire, on aurait de meilleures notes". Je trouvais ça très mignon.

Est-ce que vous êtes heureux de ce parcours ?

Je suis inquiet, là. C'est la première interview que je fais sur Azincourt et donc je me disais : j'espère que je ne serai pas trop bête. Et je suis de plus en plus inquiet à chaque livre. Je ne sais pas pourquoi. J'ai peur que les gens soient déçus. Je me dis que c'est le vingtième roman, et que ça fait vingt ans que j'en vends, mais bon, je suis de plus en plus nerveux, de plus en plus inquiet. Puis je croise les doigts en disant : j'espère que les gens vont accrocher à ce truc-là.

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