Le déficit chronique de la Sécu est-il une fatalité ?
Oui, notre Sécurité sociale est en déficit, certains disent même en faillite. L’arrêt de la croissance a provoqué un nouveau choc, le gouvernement a dû prendre des mesures supplémentaires d’économies, en rabotant notamment encore une fois les prestations familiales, pour éviter un plus grand dérapage. Au total, le déficit sera de plus de 15 milliards en 2014, et l’équilibre des comptes repoussé à 2019, enfin pour ceux qui veulent bien y croire encore.
Mais y-a-t-il une alternative ?
Il y a en la matière deux écoles. Les optimistes, d’abord : ceux-là relèvent que le déficit était de plus de 25 milliards en 2010 et qu’il a donc fondu de moitié ou presque en cinq ans, une performance qui n’est pas négligeable. Et c’est vrai. deux, ils revendiquent un État providence à la française, avec un niveau de protection sociale globale très élevé, seul rempart contre les effets de la mondialisation et de la concurrence internationale qui mettent à mal notre cohésion sociale. Enfin, ces optimistes affirment sans ciller qu’il serait vain de vouloir réduire les dépenses de santé dans nos démocraties avancées, l’allongement de la durée de la vie et nos exigences toujours plus grandes en matière de santé militent en faveur d’un système certes coûteux, mais qui relève d’un choix assumé de société. Bref, pour ceux-là, l’Etat providence n’est pas un coût, mais il est au contraire un investissement social garant de notre qualité de vie.
Mais alors que répondent les pessimistes ?
Les pessimistes se définiraient plutôt comme des réalistes. Pour ceux-là, notre Etat providence vit une triple crise : une crise de solvabilité d’abord : le financement de la protection sociale n’est plus assuré dès lors que la croissance ralentit ou pire encore se dérobe.
2- Une crise d’efficacité ensuite : notre filet social protège de moins en moins les populations les plus fragiles et les inégalités se creusent malgré une redistribution massive.
3 - Notre Etat providence subit enfin une crise de légitimité : il est de plus en plus contesté par la montée de l’individualisme et des rivalités catégorielles ou de statuts. Cette triple crise débouche sur un constat sévère : notre Etat providence n’est tout simplement plus adapté au monde moderne. Sa belle mécanique sociale a été conçu au lendemain de la Seconde guerre mondiale, quand l’espérance de vie ne dépassait guère 65 ans, que les femmes n’avaient pas encore massivement investi le monde du travail, quand le divorce était l’exception, quand le modèle familial était un couple marié avec trois enfants. C’était hier et c’était un autre monde.
Voilà pourquoi, même s’il y a du vrai des deux côtés, chez les optimistes comme chez les réalistes, l’heure n’est plus aux rafistolages, mais à la refondation d’un modèle, fondé sur un nouveau compromis social adapté aux situations et aux risques du XXIème siècle. A ne pas oser cette reconstruction sociale entreprise par tous nos voisins européens, la gauche prend le risque de voir un jour des libéraux sans complexe trancher dans le vif.
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