Le décryptage éco. Primaire de la droite et du centre : les projets de réforme de l'Etat sont-ils crédibles ?
Le dernier grand débat de la primaire de la droite et du centre a lieu jeudi soir, avant le premier tour de scrutin dimanche. En matière d’Etat et de dépenses publiques, les candidats veulent-ils tous vraiment la même chose ?
Les candidats à la primaire de la droite et du centre veulent-ils tous la même chose en matière d’Etat et de dépenses publiques ?
On a eu souvent l’impression que c’est le domaine où les programmes se ressemblaient le plus, et qu’il y avait même eu une sorte de course à l’échalote pour être le mieux disant. Tous proposent entre 80 et 100 milliards d'euros d’économie sur cinq ans, ce qui serait sans précédent.
Trois arguments assez identiques
D'abord, si la France veut retrouver du crédit politique en Europe, notamment vis à vis de l’Allemagne, elle a besoin de remette un minimum ses comptes publics en ordre, et de tenir enfin ses engagements.
Ensuite, les candidats ont bien conscience que le choc fiscal des quinquennats de Nicolas Sarkozy et de François Hollande a trop pesé sur l’activité et la croissance, et que donc s’il faut maintenant diminuer les impôts, il faudra bien financer ces baisses, surtout si elles sont significatives.
Enfin, chacun sent bien qu’il y a un problème global d’efficacité de la dépense publique. Chaque année, la France dépense plus sans pour autant que nos résultats soient meilleurs. C’est donc que le problème est plus profond.
Des coupes pas toujours détaillées
C’est le premier problème. L’Institut Montaigne, très sérieux en la matière, a passé les programmes des candidats au crible. Pour Nicolas Sarkozy, par exemple, seuls 45% des économies promises dans son programme sont vraiment documentées et donc crédibles. Le reste tient de "l’impressionnisme" dit l’Institut.
Le pourcentage monte pour François Fillon et Alain Juppé, entre 65 et 75%. Il atteint 95% pour Bruno Le Maire, mais les experts pointent cette fois la complexité du pilotage du programme.
Différences apparaissent donc. Mais au delà des chiffres et d’une vision parfois très comptable, il y a beaucoup de non-dit. Pour tenir de tels engagements quantitatifs, il faudra que l’Etat abandonne certaines missions et politiques publiques. Peut-être même est-ce nécessaire et pourrait prêter à discussion, mais le problème est que cela n’est presque jamais expliqué, jamais détaillé.
Il y a donc encore beaucoup d’inconnues dans ces programmes. Moins à l’évidence chez Fillon qui est celui qui a le plus travaillé le sujet, mais globalement c’est vrai pour tous les candidats.
Manque de crédibilité
Cela pose au moins deux problèmes. D’abord, le vrai risque est de retomber dans ce qu’ont tenté les gouvernements de François Hollande : une politique de coups de rabot successifs, un peu dans tous les domaines, et qui donnent du coup l’impression détestable que l’Etat se paupérise sans avoir fait de vrais choix, et sans avoir reconfiguré et adapté la machine publique à notre époque et à des exigences nouvelles.
C’est là qu’est le deuxième problème : tous nous disent qu’il y a bien sûr des exigences nouvelles : la sécurité, la défense, la justice, l’éducation, l’investissement public qui a beaucoup baissé. Comment financer ces exigences, si vous n’avez pas, au préalable ou dans le même temps, fortement réorganisé la puissance publique?
Confidence un peu désabusée d’un ancien ministre socialiste : "la vraie réforme de l’Etat, si vous ne l’avez pas préparée dans le fond et dans le détail avant d’arriver au pouvoir, vous ne la ferez pas, tant la tâche est herculéenne et pleine de risques". Nous voilà prévenus !
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