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Air France : crash prévisible ?

Rien ne va plus à Air France, face à l’intransigeance de ses pilotes, le conseil d’administration a décidé hier soir la mise en œuvre d’un sévère plan de restructuration : à qui la faute ?
Article rédigé par Vincent Giret
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Franceinfo (Franceinfo)

La responsabilité globale est souvent collective, mais dans le cas d’Air France, on va dire que certains ont à l’évidence une plus grande part que d’autres dans cette catastrophe, c’est le mot juste, qui frappe la compagnie aujourd’hui. Pour en prendre la mesure, il faut dire la violence des décisions qui ont filtré hier soir de la réunion du conseil d’administration :

1 / Une réduction forte des activités d’Air France, d’au moins 10% de son réseau longs courriers, avec des suppressions pures et simples de lignes.

2 / 3.300 départs programmés, dont 300 chez les pilotes, et cette fois il n’y aura pas simplement de plan de départ volontaire mais surtout des centaines de licenciements secs.

Mais pourtant la compagnie avait aussi annoncé qu’elle renouait avec les bénéfices cette année ?

C’est exact, les comptes d’Air France, sont à nouveau excédentaires en 2015, mais attention, c’est la première année après six ans de pertes et l’accumulation d’une dette importante. Et  surtout ces résultats positifs ne disent rien de la situation terrible dans laquelle se trouve la compagnie : Air France doit à nouveau s’adapter et changer son modèle, l’évolution de la concurrence ne lui laisse aucun répit. Air France est attaqué sur deux fronts :

  • Le 1er front, c’est le marché grand public, qu’on appelle le low cost, des compagnies extrêmement agressives qui ne cessent de progresser, comme Ryan-air et Easy Jet, dont les coûts et les modèles économiques ne sont pas les mêmes.

  • Le 2ème front, c’est l’autre extrême du marché, le très haut de gamme, et là l’attaque vient d’acteurs puissants qu’on a vu apparaître ces dernières années, notamment ces luxueuses compagnies venues du Golfe, qui assurent un confort sans égal et draine déjà une partie de cette clientèle d’affaires mondialisées.

    Du coup, Air France n’a pas d’autres choix, c’est s’adapter ou disparaître.

Les pilotes sont montrés du doigt, on les dit intransigeants, arcboutés sur leurs privilèges, est-ce vrai?

On peut certainement dire qu’Air France a trop tardé à s’adapter, et que plus vous commencez tard, plus c’est douloureux. Mais quand même, il y a un vrai problème avec les pilotes, pour au moins deux raisons :

1 / Ce sont les autres catégories de personnels, notamment les personnels au sol, qui ont consenti le plus d’efforts ces dernières années, les pilotes aux syndicats puissants s’en tirant à très bon compte.

2 / Si personne ne peut nier le poids des responsabilités d’un pilote d’avion, ils bénéficient à Air France de conditions qui n’ont rien à voir avec celles de la concurrence : les pilotes gagnent entre 150 et 195 000 euros bruts annuels pour un temps de travail autour de 650 heures par an. La direction d’Air France leur demande donc aujourd’hui de travailler une centaine d’heures de plus mais à salaire constant. Pour l’instant les pilotes ont dit "non". Autant le dire clairement, aujourd’hui entre Air France et ses pilotes, c’est la guerre. Et c’est totalement destructeur pour la compagnie.

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