La question du nombre et du coût des parlementaires se pose en Italie, en Allemagne et dans l’Union européenne
Dans Le club des correspondants, franceinfo passe les frontières pour voir tout ce qui se fait ailleurs dans le monde. Aujourd'hui, nous faisons un point sur le nombre de parlementaires au Parlement européen, en Allemagne mais aussi en Italie où on vote depuis dimanche sur cette question à l’occasion d’un référendum.
Les Italiens votent depuis dimanche 20 septembre pour supprimer plus d'un tiers de leurs parlementaires. La question de leur nombre revient souvent dans certains pays européens. Franceinfo s’arrête aujourd’hui sur le cas de l’Union européenne, de l’Allemagne et de notre voisin transalpin.
En Italie, un référendum-test pour le pouvoir et le mouvement 5 étoiles
Il sont 945, et vont peut être passer à 600, soit une coupe franche de 36,5%. L'Italie avait jusque-là le plus grand nombre de parlementaires après le Royaume-Uni. Rome va désormais s'aligner sur la moyenne européenne. Mais si l'on compare à la population, alors l'Italie devient avec l'Allemagne le pays européen avec la plus faible représentativité, c’est-à-dire le moins de parlementaires par habitant. En Italie le coût et même la corruption de la classe politique sont des thèmes tellement chauds ces dernières années que le référendum semblait joué d'avance. Les parlementaires italiens sont aujourd'hui les mieux payés d’Europe avec 19 000 euros par mois contre 12 000 en France par exemple.
Si tous les partis de gauche, de droite, d'extrême-droite ont voté pour la suppression des parlementaires en mettant en avant les économies (100 millions par an), la transparence ou la meilleure efficacité, certains partis dans l'opposition ont mis en garde : si le score du "Oui" est faible, le gouvernement devra en tirer les conséquence, a déclaré Giorgia Meloni, la patronne de Fratelli d’Italia.
Il est vrai que ce référendum est un test pour le pouvoir en place et surtout pour le Mouvement 5 étoiles qui le porte comme un étendard. Mais il n’y aucune chance pour que soient organisées des élections anticipées car le président du Conseil Giuseppe Conte est aujourd’hui protégé par le plan de relance qu'il doit mettre en place avec les fonds européens.
En Allemagne, un Bundestag (trop) rempli en raison d’une loi électorale
On compte 709 députés aujourd’hui. C’est le plus grand Bundestag de l’histoire allemande à ce jour et l’un des plus grands du monde, plus que les Etats-Unis, mais moins que la Chine. Le record a été battu il y a trois ans lors du dernier renouvellement avec 78 membres de plus que dans le précédent et 111 membres de plus que ce que la loi électorale prévoit, à savoir 598 députés. Ce n’est que 21 de plus qu’en France. La différence n’est pas grande alors que le pays est plus peuplé, avec 20 millions d’habitants supplémentaires. Si bien que l’Allemagne est connue pour être la démocratie européenne avec, en proportion, le plus petit nombre de parlementaires par habitant. Mais tout ceci est sur le papier, la réalité est que les députés sont aujourd’hui beaucoup plus nombreux et c’est là que ça se complique.
Sans rentrer dans les détails de la loi électorale allemande, l’idée de départ avec ce chiffre de 598, c’est que 299 d’entre eux (la moitié) sont élus en mandats directs locaux dans chacun des 16 Länder (les États), et les 299 autres au niveau de toute l’Allemagne à la proportionnelle en fonction du résultat de chaque parti. En fait, le même jour, on vote deux fois, on coche deux cases. Sauf qu’en 2013, la loi a été changée et ce que redoutaient les spécialistes s’est produit le coup d’après en 2017. Même si une force politique s’écroule au niveau national, ce qui était le cas pour les deux grands partis traditionnels que sont les conservateurs d’Angela Merkel et les sociaux-démocrates, ils ont dans leurs bastions, pour le candidat local, fait d’excellents résultats et la loi leur garantit ces sièges obtenus au scrutin direct. Il a donc fallu faire un effort de logistique au Bundestag, trouver à caser 111 sièges de plus. C’est le plus grand de l’histoire, c’est aussi forcément le plus cher : un tout petit peu plus d’un milliard d’euros !
Un chiffre considérable et qui a forcément suscité des débats. Pour les prochaines élections législatives dans un an, l’Allemagne veut éviter que cela se reproduise. Sauf que le temps presse et que les choses semblent mal engagées pour que la loi électorale soit modifiée à temps. Il est question de réduire le nombre de circonscriptions ce qui ferait donc un nombre d’habitants encore plus élevé pour chaque parlementaire alors qu'on est déjà sur le plus petit nombre de parlementaires par habitant. En fait, peu importe les propositions des uns ou des autres, personne n’arrive à retomber sur la base fixée à 598. Pour l’option qui réduit le plus leur nombre, on tombe péniblement à 642 au lieu des 709 aujourd’hui. Et comme le compromis ne vient pas, les prévisions pour l’an prochain avec le système électoral actuel donnent un parlement gigantesque à plus de 800, voire près de 900 députés.
Au Parlement européen, la guerre Bruxelles-Strasbourg revient avec le Covid-19
Depuis février, les 705 eurodéputés n’ont plus mis les pieds à Strasbourg pour éviter une propagation du coronavirus et cela commence à inquiéter les défenseurs de cette transhumance mensuelle. Pour rappel, le siège officiel du Parlement est à Strasbourg. C’est là que se tiennent 12 sessions plénières par an de trois jours et demi avec tous les députés. Tout le travail préparatoire aux votes se déroule à Bruxelles en lien avec les autres institutions où il y a un autre Parlement avec un autre hémicycle, et où les votes se tiennent donc depuis six mois.
Cela convient bien à ceux qui dénoncent le coup financier et écologique des aller-retours des parlementaires européens : 50 à 100 millions d’euros par an selon les estimations. Mais du côté du gouvernement français, hors de question de lâcher l’affaire. D’abord parce que Strasbourg abrite la seule institution européenne française. C’est par ailleurs la ville symbole de la réconciliation européenne. S’y rendre permet aussi de sortir les fonctionnaires de leur bulle bruxelloise, estiment les pro-Strasbourg, et d’avoir une meilleure couverture par la presse du travail législatif. Ce qui n’est pas faux car à Bruxelles l’actualité est telle qu’on privilégie souvent le travail de la Commission à celui du Parlement, et cela malgré le poids croissant de son influence sur les décisions européennes.
On imagine aussi l’impact économique pour Strasbourg depuis que les 2 500 députés fonctionnaires et journalistes ne viennent plus y dormir, manger ou utiliser les taxis. La France a donc haussé le ton et rappelé que la tenue de 12 sessions à Strasbourg est inscrite dans les traités. Elle plaide donc pour un retour rapide à la normale et réclame des compensations pour les sessions annulées. Certains travaux de la conférence sur l’avenir de l’Europe pourraient s’y tenir. Changer les traités n’est pas dans les tuyaux car il faudrait une décision à l’unanimité.
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