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Reportage
"Ils votent Biden parce que c’est ce qu’on leur dit de faire" : aux États-Unis, l'électorat noir de moins en moins séduit par le vote démocrate
En Géorgie, ancien État ségrégationniste, les églises noires se mobilisent pour inciter les fidèles à aller voter et éviter un fort taux d'abstention, qui ferait le jeu du parti républicain. C’est le cas dans cette église baptiste de Savannah, où, ce jour-là, un dimanche, le révérend Thurmond N. Tillman appelle au vote pour des élections locales. "Le vote anticipé commence demain, n’oubliez pas de voter !", rappelle-t-il avant la fin de la messe.
"Je ferai pareil à l’approche de la présidentielle", assure ce pasteur qui, sur son site internet, a mis des photos de lui, aux côtés de Joe Biden ou de Barack Obama, et qui s’inquiète de voir une partie de son audience se désintéresser de cette élection. "On voit beaucoup d’apathie chez les jeunes électeurs en particulier, ceux qui n’ont pas vécu la lutte pour les droits civiques ; pour eux, c’est de l’histoire ancienne", déplore le révérend. Il évoque aussi "tous ceux qui ont voté pour Obama ou même pour Biden, et qui n’ont pas été soulagés", qui n'ont pas "vu arriver plus d’argent ou de meilleurs emplois". Pour autant, assure Thurmond N. Tillman, "il y a de plus grandes opportunités aujourd’hui", mais elles ne sont pas "arrivées jusqu’à eux."
"Je pense à un jeune en particulier, très direct, qui dit 'pourquoi on doit voter ? Pourquoi tu nous parles toujours de ça ?'", évoque le révérend. Il s'agit de Kareem Albany, 24 ans, qui dit avoir le sentiment que sa voix et son opinion "ne comptent pas" : "Les Noirs américains votent démocrate parce que c’est ce qu’on leur dit de faire, déplore-t-il. Mais je n'achète pas, je soutiens Trump. Quand il était président, il a envoyé aux gens de l’argent, des chèques de soutien, pendant la crise du Covid", alors que "ça allait très mal", dans la famille du jeune homme.
"Il a aidé beaucoup de gens en Amérique", salue-t-il. Mais il l'assure, il n'est "ni républicain, ni démocrate". "Je ne suis rien. Moi je crois en Dieu, et ce sera lui mon président."
Donald Trump tente de récupérer l'électorat noir
En 2020, Donald Trump avait marqué des points auprès de l’électorat afro-américain par rapport à 2016, ce qui fait craindre au parti démocrate une nouvelle progression. Mais "nous n'en sommes pas encore là", explique Andra Gillespie, chercheuse en Sciences Politiques à l’Université Emory à Atlanta. "Même si Donald Trump gagne des voix en 2024, je ne m’attends pas à ce qu’on dise 'Oh mon Dieu, Trump a récupéré un quart du vote noir'".
"La vraie question, c’est combien d’électeurs noirs vont participer à cette élection. C’est ce qui peut faire la différence entre une victoire et une défaite dans la bataille pour l’État."
Andra Gillespieà franceinfo
"Trump essaye de dire qu’il a bien fait au niveau économique pour les personnes noires, en parlant du faible taux de chômage des Afro-américains pendant son mandat", ajoute la chercheuse, qui détaille une autre partie de la stratégie de l'ancien président, qui essaye "d’utiliser ses déboires en justice, pour créer un lien avec la communauté noire".
Lors des primaires, en février, Donald Trump avait comparé ses inculpations avec les discriminations subies par les Afro-américains. "J’ai été inculpé pour rien et beaucoup de gens ont dit que c’est pour ça que les personnes noires m’aiment bien, parce qu’elles ont tellement souffert et été discriminées, elles me voient aussi comme quelqu’un de discriminé maintenant", avait affirmé le candidat à l'élection.
Cet argument est un repoussoir pour Rhonda, 66 ans, membre d’une association de femmes noires. Il est "important de comprendre que le racisme et les discriminations sont toujours d'actualité", rappelle-t-elle. "L’Amérique est faite de gens très différents, avec des histoires très différentes", alors que "Trump ne pense qu'à lui, à sa famille et à ses amis riches."
Kamala Harris dresse le bilan du mandat Biden
Pour inciter l’électorat noir à ne pas se démobiliser et à voter démocrate, l’administration Biden a lancé une tournée sur le thème de l’économie fin avril. Pour le coup d'envoi, Kamala Harris, vice-présidente des États-Unis, a choisi Atlanta, en Géorgie. Elle y a fait le bilan de la présidence Biden, en assurant avoir "réduit le chômage des Noirs à un niveau historique", et en annonçant vouloir "augmenter de 50% les contrats que passe l’État avec des entreprises des minorités."
"Nous sommes sur la bonne voie", a clamé la vice-présidence, en mettant "beaucoup d’argent dans les rues d’Amérique, avec des milliers de milliards dans les infrastructures : les routes, les ponts, les trottoirs, les transports publics", mais aussi "dans des investissements, dans les énergies propres." "N’abandonnez pas ! On a besoin de vous ! Notre pays a besoin de vous", a imploré Kamala Harris. En Géorgie, chaque bulletin va compter pour cette présidentielle. En 2020, les démocrates avaient gagné avec moins de 12 000 voix d’avance.
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