Reportage
"C'est lamentable" : en Gironde, ces retraités "dégoûtés" de la politique à l'approche des législatives

À deux semaines du premier tour des élections législatives et au cœur du tumulte politique, franceinfo a décidé de prendre le temps d'écouter certains Français pour comprendre leur vote. Ici, pause dans le département de la Gironde.
Article rédigé par Boris Loumagne
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Une personne tient une enveloppe avant d'aller voter. (NICOLAS VALLAURI / MAXPPP)

À moins de deux semaines du premier tour des élections législatives, Franceinfo est allé à la rencontre de retraités qui tentent d’arrondir leurs fins de mois en participant à un vide-grenier en Gironde. Premier arrêt sur le stand de Jacqueline, où l'on trouve "des jeux pour les enfants, des livres, des cartes postales, des timbres, un peu de tout..."  A 74 ans, Jacqueline est une habituée des vide-greniers : "Ça sert à l'argent de poche pour les vacances de la famille."

C’est même plus que de l’argent de poche, c’est un vrai complément de revenu pour elle qui touche une petite retraite. "Juste au-dessus du minimum vieillesse" : 900 euros par mois après avoir travaillé toute sa vie. "J'ai fait la boulangère, j'ai fait la vigne, j'ai fait des travaux agricoles, les asperges et tout ça", énumère Jacqueline. Des petits boulots souvent, mais elle s’en est toujours sortie : "Je ne vais pas me plaindre de ma jeunesse. Les années 60, 70, je ne vais pas m'en plaindre. Avec le Smig, autrefois, tu te payais un loyer, tu t'achetais une voiture... Maintenant, ça commence à être un peu dur. Les caddies diminuent pour le même montant."

"Ils me cassent les pieds donc je ne suis plus rien"

C’est bien parce qu’elle voit son pouvoir d’achat diminuer d’années en années qu’aujourd’hui la retraitée n’a plus foi en la politique. "Je vais vous dire quelque chose. La politique j'étais à fond dedans et là depuis 15-20 ans, ils me cassent les pieds, donc je ne suis plus rien. Ça ne m'intéresse plus." Les promesses de campagne ? "Je n'écoute plus." L’augmentation des pensions proposée par plusieurs candidats ? "Qu'est-ce qu'ils vont faire ? Il n'y a pas d'argent. La retraite à 60 ans, ils sont gentils, les jeunes ils travaillent à 30 ans, ils vont travailler 30 ans, nous, on en a travaillé 42. Ils sont à côté de la plaque. Ils ne vivent pas dans le même monde que nous."

Alors, Jacqueline se déplacera tout de même le 30 juin : "Je subis, mais je vais voter quand même." L’idée d’une coalition entre RN et LR aurait d’ailleurs même pu la séduire : "Qu'on arrive à s'entendre, à faire une union. Si on n'est pas trop bêtes, ça devrait être possible. Mais après, il y en a toujours un qui en veut plus que l'autre et tirer la couverture à lui." Jacqueline ne se fait plus aucune illusion. Et d’ailleurs le peu qu’elle entrevoit de cette campagne électorale a fini de la "dégoûter" complètement de la politique.

"Dire qu'on vote pour des personnages comme ça !"

Cette retraitée n’est pas la seule à éprouver ce sentiment de dégoût vis-à-vis de la classe politique. C’est un mot qui revient sans cesse. Sur le stand de Mariette et Alain, 71 ans tous les deux, il y a un épisode de la campagne qui fait réagir. Le siège du parti LR fermé à clé par Eric Ciotti : "Et dire qu'on vote pour des personnages comme ça ! C'est lamentable. C'est un sketch, moi, je ne me reconnais plus. À l’époque, je me rappelle de Mitterrand, c'était un monsieur quand il parlait. Il disait quelque chose, il était respecté. On n'en a plus des personnages comme ça."

"Je suis inquiet pour mes petits enfants, parce que je ne sais pas dans quel monde ils vont tomber."

Alain

à franceinfo


"Je pense à eux, ma vie elle est finie", renchérit Mariette. À côté, en fauteuil roulant, son petit-fils. Mariette s’en occupe au quotidien. Et la perspective du RN au pouvoir lui donne des sueurs froides : "Le Front national à l'Etat. Vous imaginez un peu ? Qu'est-ce que ça va donner ? Je ne trouve pas qu'ils sont du tout dans le social et encore moins pour le handicap. Remarquez, la ministre Geneviève Darrieussecq, qu'est-ce qu'elle a fait pour les handicapés ? On se le demande. Il faudra qu'elle nous dise ce qu'elle a fait."

Mariette et Alain sont tous les deux d’anciens adhérents du PS. Ils ont quitté le parti quand Emmanuel Macron y est entré. Le 30 juin ils voteront pour le Nouveau Front populaire, sans grande conviction, surtout pour faire barrage au Rassemblement national.

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