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L'avènement de l'embryon de synthèse : des perspectives scientifiques et éthiques vertigineuses

La technique, vertigineuse, est prête : deux équipes viennent d’annoncer avoir réussi à façonner un embryon humain jusqu’à 14 jours, limite permise par la loi, dans une boite de Pétri, à partir de cellules souches.
Article rédigé par franceinfo - Hervé Poirier
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Temps de lecture : 3min
Un embryon de synthèse de 14 jours, formé de 2 500 cellules ; il mesure un demi-millimètre. C’est le premier véritable embryonoïde humain. (NATURE 2023 / JACOB HANNA / WEIZMANN INSTITUTE)

Hervé Poirier, rédacteur en chef au magazine scientifique Epsiloon, nous parle aujourd'hui d’une prouesse de laboratoire, à la fois spectaculaire et glaçante : un embryon humain synthétique, formé à partir d’une simple cellule de peau… 

franceinfo : La technique est très pointue et pose de nombreuses questions, éthiques notamment ? 

Hervé Poirier : C’est très impressionnant, oui. Et cela ouvre des perspectives scientifiques et éthiques vertigineuses. L’expérience est l’aboutissement d’une technique développée depuis une quinzaine d’années : les organoïdes. C’est devenu presque une routine en laboratoire : en mettant une simple cellule dans les bonnes conditions, les biologistes sont capables de la faire se différencier et se multiplier, jusqu’à former un organe.  

Cœur, pancréas, cerveau : presque tous les organes humains ont été reproduits in-vitro. Et ces "cardioïdes", ces "pancréaoïdes" et ces "cérébroïdes" permettent déjà de tester à la chaîne des traitements médicaux, promettant même des transplantations sur mesure.  

Or, les progrès sont fulgurants. Il y a un an, plusieurs équipes avaient réussi à faire pousser in vitro tout un embryon de souris. Il y a un mois, deux équipes avaient présenté des ébauches d’embryons humains, mais les résultats étaient assez imparfaits. Cette fois, ça y est : l’équipe de Jacob Hanna, à l'Institut Weizmann, en Israël, vient de présenter cette semaine un embryon humain de 14 jours convenablement développé. Il est formé de 2 500 cellules et mesure un demi-millimètre. C’est le premier véritable embryonoïde humain.  

Cet embryon n’est donc pas issu d’un spermatozoïde et d’un ovule ?

Non ! On prend une cellule de votre peau. On la ramène à l’état de cellule souche naïve. On la fait pousser dans une boite de Pétri. Et on obtient un "Jean-Réminoïde", votre double, doté du même génome.  

Et quel est l’intérêt de ces travaux ?  

Cela promet par exemple de mieux comprendre certains problèmes d’infertilité. L’équipe de Jacob Hanna vient ainsi de découvrir que si l’embryon n’est pas enveloppé de la bonne façon par les cellules formant le placenta au dixième jour, il ne se développe pas correctement, ce qui explique l'échec précoce de certaines grossesses.  

Et j’imagine que ces travaux sont encadrés par des lois éthiques ?    

Pour les embryons, oui. Moins pour ces embryons synthétiques. Il y avait une sorte de consensus éthique international sur la limite des 14 jours, qui correspond au moment où l’embryon a fini son installation dans l’utérus. C’est ce qu’impose la loi de bioéthique en France. Mais ce n’est pas le cas partout, par exemple en Israël.  

Pour l’instant, rien ne dit que la technique permette d’aller au-delà. Mais les progrès sont si rapides que la question se pose déjà. Quel est le statut juridique de ces embryonoïdes ? Jusqu’où peut-on pousser ces expériences ? Qu’est-ce que la vie ? Les vertiges ne font que commencer… 

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