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Régulation européenne sur les GAFA : "On a laissé trop faire", déplore l'économiste Joëlle Toledano

Joëlle Toledano, économiste, ancienne membre de l’Arcep et auteur de "GAFA, reprenons le pouvoir", appelle à une prise de conscience pour mieux contrôler les géants américains du numérique.

Article rédigé par franceinfo, Emmanuel Cugny
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2min
L'économiste Joëlle Toledano invitée de franceinfo le 2 octobre 2020 (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Réunis pendant deux jours, les 1er et 2 octobre, en sommet à Bruxelles, les dirigeants européens doivent fixer un nouveau cadre pour superviser les plateformes internet, notamment les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon), sur le continent. Les 27 États membres doivent poser les bases d'une nouvelle législation, prévue pour entrer en vigueur en décembre. "On a laissé trop faire", a dénoncé l'économiste Joëlle Toledano, spécialiste dans la régulation des marchés, vendredi 2 octobre sur franceinfo.

Des lois européennes inadaptées

Selon elle, les GAFA se soustraient aux contrôles des États avec trop d'aisance. "Ils contournent les régulations, d'autant plus qu’ils sont face à un droit du 20e siècle et qu’eux sont nés au 21e siècle", explique-t-elle. "Nous n'avons pas encore mis en place les moyens du 21e siècle pour répondre aux défis qu'ils nous posent." L'économiste rajoute que les États européens n'ont pas réagi suffisamment vite. "On a été collectivement naïfs parce que nous étions presque tous fascinés ! C'était génial parce que chacun d'entre nous a utilisé ces outils, qui nous ont ouvert un nouveau monde."

Sans contrôle, les entreprises européennes ne feront pas le poids

Joëlle Toledano prône une reprise de contrôle : "Reprenons en tant que pays, en tant que collectivité, le pouvoir d'être les États régaliens que nous sommes normalement, des États de droit." L'économiste conseille de "mettre en place une régulation qui corresponde à la situation" et à "leurs spécificités". Si rien n'est fait par les dirigeants européens, Joëlle Toledano craint que "l'innovation" des entreprises européennes "ne puissent pas se développer", "les concurrencer" et récolter leur part.

Face à la proposition faite jeudi par Google de verser un milliard de dollars sur trois ans aux éditeurs de presse dont l'entreprise exploite les contenus, Joëlle Toledano voit "une carotte mise au milieu de la table" et une stratégie délibérée de substituer à la régulation publique une régulation privée : "Cet argent, c'est beaucoup mais au regard de la puissance de Google et au niveau mondial ce n'est pas tant que ça. Et puis ce qu'il a fait un jour, il pourra le défaire le lendemain donc ça n'a rien à voir avec un partage qui respecte les règles de la valeur créée par un collectif".

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