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Gastronomie : le chef du "meilleur restaurant du monde" met la clé sous la porte

René Redzepi a obtenu le prestigieux titre cinq fois et possède trois étoiles Michelin pour son restaurant Noma. Pour lui, ce modèle de très haute gastronomie n’est plus tenable, "ni en tant qu’employeur, ni en tant qu’être humain".

Article rédigé par Marion Lagardère
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le chef du Noma Rene Redzepi. (THIBAULT SAVARY / AFP)

Noma à Copenhague au Danemark est une institution : ce restaurant a été couronné meilleur restaurant du monde cinq fois en vingt ans d’existence et auréolé de trois étoiles Michelin, mais pour son chef René Redzepi, 45 ans, c’est trop, c’est intenable. Il a donc annoncé la fermeture de son restaurant, prévue pour 2024 "parce que ce modèle de très haute gastronomie, dit-il au New York Times, n’est pas soutenable, ni financièrement ni émotionnellement, ni en tant qu’employeur ni en tant qu’être humain, il ne marche tout simplement pas."

René Redzepi explique que l’on ne peut pas tout à la fois rester au firmament gastronomique, répondre à toutes les attentes, garder sa créativité, et maitriser le stress que cela implique, avoir un management sain, ne pas transformer sa cuisine en caserne et ne pas perdre son humanité pour des plats qui demandent parfois 70h de préparation et une trentaine de personnes. C’est ce qu’a vécu René Redzepi, mais aussi ce qu’ont enduré et dénoncé certains de ses employés, notamment les stagiaires : si Noma a pu fonctionner jusqu’à présent, c’est parce que son chef a fait travailler des stagiaires gratuitement.

Un débat sur la perte de sens de la haute gastronomie

Depuis octobre, tous sont systématiquement rémunérés, mais le fait est là : la haute gastronomie écrase, elle exacerbe les frustrations, le stress, l’impulsivité. Le phénomène a d'ailleurs donné des idées pour des séries très réalistes qui cartonnent actuellement comme The Menu ou The Bear ; leurs réalisateurs se sont d'ailleurs inspirés de la vie de Redzepi. Alors pourquoi tant de violence en cuisine ?

Le chef danois confie qu’il a fini par faire une thérapie pour examiner ses frustrations, ses peurs, sa solitude. Il revient certes sur son caractère, mais ajoute qu’il y a peut-être quelque chose de systémique. L’absurdité à se plier en quatre pour créer des plats à partir d’ingrédients locaux, de saison, dans une philosophie écologique et durable, pour en même temps ne servir qu’une minorité de gens qui sont précisément ceux qui affichent les pires bilans carbone de la planète.

Le problème, c’est le sens, d’où la transformation du restaurant : le Noma va fermer pour devenir un centre de recherche sur les gouts de demain et pour sortir de la compétition. René Redzepi est loin d’être un saint, mais sa décision a au moins le mérite d’ouvrir un débat sur le sens : la haute gastronomie pour qui, pour quoi et surtout, sur le plan humain, comment ?

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