Elisabeth Borne à Matignon, le choix de l'évidence
Emmanuel Macron a donc nommé Elisabeth Borne à Matignon. Un choix sans risque pour le président.
À première vue, c’est un choix confortable pour le président, en termes de confiance, de loyauté. Ils travaillent déjà ensemble et Elisabeth Borne ne devrait pas lui faire d’ombre. C'est une pro de la décision publique, au sein de cabinets ministériels sous la gauche, puis à la tête de la RATP. Depuis cinq ans, elle est même devenue la ministre "couteau suisse" de la Macronie. Chaque président en a eu au moins un : François Hollande comptait sur Bernard Cazeneuve, Nicolas Sarkozy sur Xavier Bertrand, avant de se brouiller, Jacques Chirac sur Michèle Alliot-Marie entre autres... Des ministres tout-terrain, capables de passer d’un portefeuille à l’autre, souvent pour éteindre une crise.
Depuis 2017, Elisabeth Borne a tour à tour géré les Transports, la Transition écologique et enfin l’Emploi. Elle y a fait preuve de fermeté, lors des réformes de la SNCF et de l’assurance-chômage, mais elle a aussi dialogué avec les partenaires sociaux. Pas inutile au vu des urgences à venir sur le pouvoir d’achat ou les retraites. Elisabeth Borne cochait donc nombre de cases pour atterrir à Matignon. Son nom est d'ailleurs le tout premier qui avait circulé.
Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il mis trois semaines pour la nommer ?
Parce qu’il a hésité et qu’il a testé d’autres hypothèses. Mais chacune d’entre elles a suscité des tensions au sein de sa majorité. La dernière éventualité en date, l’ancienne ministre chiraco-sarkozyste Catherine Vautrin, a déclenché de vives critiques parce qu’elle penchait trop à droite aux yeux de nombreux marcheurs.
C’est là qu’on touche, cinq ans après son avènement, aux limites du macronisme : pas vraiment de gauche, mais pas complètement à droite non plus. Et Emmanuel Macron a beau récuser ce clivage, ceux qu’il recrute ont eu une vie avant de le connaître, des engagements, des prises de position, des responsabilités. À droite ou à gauche. D’où la tentation du moindre risque, celle qui consiste à opter pour un profil plus "techno", du type d’Elisabeth Borne. Une pro, donc, qui a servi toujours l'État plutôt qu’un camp ou l’autre, et dont l’existence politique a d’ailleurs commencé avec l’élection d’Emmanuel Macron.
La vraie nouveauté, c’est qu’il s’agit d’une femme. Elle n’est que la deuxième femme Première ministre dans toute l’histoire de la République. La première, Edith Cresson, c’était il y a 31 ans... Ce geste était attendu. Il y avait urgence. Le gouvernement sera également paritaire. Pas sûr toutefois que cela suffise à définir le "nouveau président", le "nouveau mandat" et la "nouvelle méthode" promis par Emmanuel Macron lors de son investiture.
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