L'acidification des océans
Le CO2 ou gaz carbonique, n'est pas seulement responsable du réchauffement climatique. En fait tout le CO2 que nous émettons en brûlant du pétrole, du charbon ou du gaz, ne reste pas dans l'atmosphère. Une partie non négligeable (25 %) est absorbée par les océans.
Pour le climat de la planète c'est plutôt une bonne chose.
Sans les océans, le réchauffement serait encore plus important. Mais ce rôle d'amortisseurs que jouent les mers du globe a un prix. C'est précisément l'absorption de ces quantités phénoménales de CO2 par les océans qui provoque leur acidification.
Depuis le début du développement industriel, l'acidité des océans a augmenté de près de 30%. Selon des simulations, si nos émissions de gaz carbonique se poursuivent au même rythme, l'acidité des océans pourrait plus que doubler d'ici 2100. Les études indiquent que l'acidification en cours est bien plus rapide que celles qui se sont produites naturellement au cours des 50 derniers millions d'années.
Des conséquences sur les organismes vivants dans les océans
Mais, bien curieusement, les scientifiques ont beaucoup attendu avant de se poser cette question. Ils ont même longtemps pensé que l'absorption du CO2 par les océans serait sans grande conséquence pour les organismes qui y vivent. En France, l'un des premiers scientifiques à s'être intéressé à ces questions s'appelle Jean-Pierre Gattuso. Son premier article sur ce sujet date de 1998. A cette époque quasiment personne ne s'y intéressait. Il faudra attendre 2004 pour voir le nombre de chercheurs et d'études sur ce thème s'envolé.
D'ailleurs le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat, (le Giec), ne s'est prononcé que tout récemment sur cette question. Dans le deuxième volet de son 5eme rapport paru il y a un mois, il précise pour la première fois l'impact de l'acidification des océans sur les organismes marins.
Les premières victimes
Les premiers à pâtir de l'acidification des océans seront les organismes dotés de squelette ou de coquille calcaire.
Par exemple, les coraux ou les mollusques comme les moules ou les huitres seront en première ligne. Dans une eau plus acide, ces organismes auront plus de mal à fabriquer leur coquille ou leur squelette calcaire car les briques dont ils se servent (les ions carbonates) seront moins nombreuses.
Les poissons aussi seraient aussi touchés, d'abord de façon indirecte. Quand une partie d'un écosystème est affecté cela a des répercussions sur l'ensemble. Par exemple, la dégradation des récifs coralliens aura des répercussions sur les espèces qui s'y abritent. Mais les poissons seraient aussi touchés de façon directe. Des études indiquent que l'acidification des océans aurait des effets sur la physiologie de certains poissons et notamment sur leur système sensoriel. Ce qui les rendrait par exemple incapables de détecter la présence d'un prédateur.
Il reste des incertitudes sur les effets de l'acidification sur les organismes marins. Les recherches dans ce domaine sont récentes et très nombreuses. Les éléments ci-dessus font consensus mais d'autres sont plus contradictoires. Il y a encore du travail pour affiner les connaissances sur ce sujet.
Prévoir les effets de l'acidification
Pour prévoir les effets de l'acidification sur le monde marin, les chercheurs peuvent mener des expériences dans des aquariums dont ils font varier l'acidité mais ils regardent aussi avec attention des sites où l'eau est naturellement plus acide. Au large de l'île d'Ischia près de Naples, en Italie, ou encore près de Papouasie-Nouvelle Guinée, on trouve, au fond de l'eau, des sources naturelles de CO2. Du CO2 qui provient des entrailles de la planète et qui, localement, acidifie l'eau. Les chercheurs ont constaté que dans ces zones, la quasi totalité des espèces de coraux a disparu et que 30 % de l'ensemble des espèces ont déserté. Pour les scientifiques ces endroits constituent de véritables fenêtres sur le futur. Ils donnent une idée de la façon dont les écosystèmes marins pourraient évoluer d'ici la fin du siècle, au train où vont les choses.
Actuellement, il n'est pas possible d'arrêter complètement l'acidification des océans.
Les modèles indiquent que, quoi qu'il arrive, la chimie de l'eau de mer restera altérée pendant des centaines d'années. Toutefois, on peut encore espérer limiter l'ampleur de l'acidification des océans. Pour y parvenir, la seule solution serait de réduire nos émissions de CO2. On savait déjà qu'il était urgent de le faire pour lutter contre le réchauffement climatique,on a maintenant une deuxième bonne raison pour passer à l'action.
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