Les sœurs Kuperberg ressuscitent Dorothy Arzner, une pionnière du cinéma américain

Clara et Julia Kuperberg, deux sœurs documentaristes, réalisatrices et productrices signent ensemble un film pour la plateforme OCS,sur Dorothy Arzner, diffusé dimanche 12 novembre à 22h40. Première réalisatrice à Hollywood, la seule dans les années 1930 et 1940, lesbienne assumée, ce qui était très rare à l'époque, cette pionnière du cinéma américain a été totalement oubliée.

franceinfo : Comment se fait-il que cette femme, si importante pour l'histoire du cinéma, soit tombée aux oubliettes et notamment aux États-Unis? 

Julia Kuperberg : Bonne question. On peut dire ça de toutes les femmes pionnières, en fait de réalisatrices à Hollywood, notamment dans les années 20-30, 40. Elles ont créé Hollywood, elles ont inventé presque toute la technique là-bas aussi.

"Ces femmes ont été complètement oubliées parce que les hommes sont arrivés dans les années 30 et les ont virées de tous les postes pour les leur prendre." 

Julia Kuperberg, documentariste

à franceinfo

Comment vous l'avez découverte cette Dorothy Arzner ? 

Clara Kuperberg : Nous l'avons découverte en 2015, quand nous avons fait un documentaire sur les pionnières d'Hollywood, justement, on a découvert cette histoire, sortie d'une boîte de photos de femmes qui dirigeaient derrière la caméra, qui n'étaient pas devant. Et parmi ces femmes, il y avait Dorothy Arzner, qu'on n'avait jamais rencontrée dans notre carrière. Elle était habillée en homme, elle affichait son homosexualité à une époque où, franchement, ça ne se faisait pas. 

Elle a démarré dans les prestigieux studios de la Paramount. Très vite, elle témoigne d'un grand talent, en tant que monteuse d'abord, puis scénariste et réalisatrice. Mais elle a dû se battre pour y arriver. À l'époque, ce sont les hommes qui dirigeaient tout.

Julia Kuperberg : Elle a commencé en bas de l'échelle. Elle a commencé en tant que scripte. Après monteuse. Elle a eu beaucoup de succès en tant monteuse, elle a inventé plein de techniques de montage. Pour la perche de son, c'est incroyable, elle a eu l'idée de prendre une canne à pêche et un micro qu'elle a accroché au bout. C'est comme ça qu'est née la perche, qu'on utilise encore aujourd'hui.

Elle a aussi inséré des images d'archives. Pouvez-vous nous expliquer ce procédé ? 

Clara Kuperberg : C'est pour un film avec Rudolph Valentino, star du muet, elle a sauvé le film en incorporant des images d'archives de corridas parce que ça coûtait trop cher d'emmener tout le monde en Espagne et de tourner des vraies corridas. 

Ses 16 films qui ont tous un point commun : ce sont des histoires de femmes qui sont contre le mariage, contre l'hétérosexualité ?

Julia Kuperberg : Généralement, les films à Hollywood s'arrêtent sur :Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants. Elle, elle continue l'histoire. Les films avec de Dorothy commencent sur : Qu'est ce qui se passe après Ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants. Est-ce que ça rêve de conte de fées ou pas? Généralement, ça se passe mal. 

Ce sont des films qui ont eu du succès ?

Clara Kuperberg : Oui, beaucoup de succès. C'est pour ça, qu'elle était indépendante et qu'elle avait du pouvoir. Ces films faisaient beaucoup d'entrées et rapportaient de l'argent. Et comme elle aussi en avait aussi de l'argent d'une fortune familiale, elle avait cette liberté aussi de dire oui et non aux patrons des studios qui étaient tous des hommes. 

Dorothy Arzner, c'est la mentor d'un grand cinéaste d'aujourd'hui que vous avez rencontré pour le documentaire ? 

Julia Kuperberg : Eh oui, Francis Ford Coppola était son élève. À la fin de sa vie, elle a enseigné à l'université de cinéma à Los Angeles. Et Francis Ford Coppola était son élève et il s'en souvient avec des trémolos dans la voix et franchement, elle lui a appris beaucoup de choses. Il le raconte dans le documentaire On a eu beaucoup de chance de l'avoir.

Vous préparez une fiction, une série sur les pionnières d'Hollywood, c'est ça ?

Clara Kuperberg : On est en train de vendre ça aux États-Unis. Ça fait longtemps qu'on essaie de la vendre et là, ça commence à prendre forme. On va montrer ces femmes et leurs histoires personnelles ce qu'on ne peut pas traiter dans le documentaire, car on n'a pas le temps. Là, ça va être leur vie personnelle, leur mariage, comment ça se passait, etc... Il y aura Dorothy Arzner dans cette série.

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