Que devient Jean-Pierre Sauvage depuis son prix Nobel de chimie en 2016 ?
Le chimiste de l'université de Strasbourg a reçu le prix Nobel en octobre 2016.
Le 5 octobre 2016, Jean-Pierre Sauvage a reçu le prix Nobel de chimie. La récompense suprême vient couronner ses travaux sur les machines moléculaires. À 72 ans, ce chimiste de l'université de Strasbourg a encore du mal à y croire quand il réagit sur franceinfo, quelques minutes après avoir appris la nouvelle : "Je n'ai pas encore digéré l'information. Il y a eu un coup de téléphone de Stockholm. Mais pour quelqu'un qui est en fin de carrière, il n'y a pas tellement de chamboulement à attendre."
Une parole plus contrôlée
Finalement, la vie de Jean-Pierre Sauvage a été bien plus bouleversée qu'il ne l'imaginait. Quelques jours après son prix Nobel, le chimiste a commencé à crouler sous les sollicitations, venues du monde entier. L'université de Strasbourg a donc offert à Jean-Pierre Sauvage les services d'un assistant personnel pour aider le nouveau Nobel à gérer ses rendez-vous et répondre aux courriers électroniques.
"Cela a beaucoup changé ma vie, raconte Jean-Pierre Sauvage, Tout d'un coup, on change de statut. On a une notoriété qui intéresse des tas de gens et qui les incitent à vous inviter à faire des conférences partout dans le monde, même dans des domaines qui sont souvent très éloignés de vos domaines de compétence."
Le lauréat du Nobel explique que sa voix porte davantage à présent : "C'est toujours l'effet de la notoriété. On va appeler cela l'effet Nobel, c'est-à-dire qu'on vous écoute davantage que si vous étiez scientifique, même déjà reconnu, mais n'ayant pas ce statut". Ce nouveau rang met une certaine pression sur les épaules de Jean-Pierre Sauvage : "Vous ne pouvez plus vous permettre de dire n'importe quoi. J'avais une parole assez libre, et aujourd'hui il y a une tendance peut-être à se censurer vaguement."
40 ans de travaux
Jean-Pierre Sauvage a commencé à s'intéresser aux machines moléculaires, il y a une quarantaine d'années. Son travail a été récompensé des décennies plus tard : "Cela fait un décalage, mais je crois que c'est vrai pour tous les prix Nobel de sciences expérimentales. Une fois qu'on a les premiers indices qui vont conduire à des travaux importants, il faut renforcer et généraliser les concepts qu'on a proposés. Cela peut prendre des dizaines d'années."
Le Nobel conserve un souvenir particulièrement fort des cérémonies de remise des prix à Stockholm : "C'est quelque chose qui est complètement hors du monde. On passe 10 jours à Stockholm dans un environnement de conte de fée. Quand on revient, on a l'impression d'avoir rêvé pendant 10 jours, c'est quelque chose d'inoubliable."
Peu de vacances
Depuis qu'il a été récompensé, Jean-Pierre Sauvage manque de temps libre. "Je faisais un peu de jardinage et je n'en ai pas fait pendant six mois. Et puis, nous ne sommes pratiquement pas partis en vacances. On recommence à le faire maintenant", explique le Nobel de chimie qui s'attend à d'autres lauréats français dans les prochaines années.
"Quand et dans quel domaine ? C'est vraiment très difficile à dire, mais je pense à certaines personnes qui sont de grands scientifiques relativement bien placés, analyse Jean-Pierre Sauvage, Mais il y a un côté tellement aléatoire. Un grand scientifique dont tout le monde pense qu'il va avoir le prix Nobel peut très bien ne jamais l'avoir. Sur 10 grands scientifiques, neuf ne l'auront pas."
Le Nobel de chimie n'en a pas terminé avec ses voyages au long cours. Jean-Pierre Sauvage va retrouver prochainement ses deux autres colauréats (James Fraser Stoddart et Bernard Lucas Feringa) pour un cycle de conférences à Shanghaï.
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