"On est des explorateurs" : quelles espérances suscite Iseult, l'IRM français le plus puissant du monde ?
Le 2 avril 2024, un événement mondial s'est tenu au Commissariat à l'énergie atomique (CEA) à Paris-Saclay. On y a dévoilé des images d'une précision inégalée à ce jour d'un cerveau humain. Une prouesse technique obtenue grâce à un appareil baptisé "Iseult", l'IRM le plus puissant du monde. Nicolas Boulant, directeur de recherches au CEA, a travaillé à sa conception : "Avec ces images, décrit-il, on peut voir des détails assez époustouflants qui nous renseignent ici sur des détails anatomiques, comme des veines ou des couches corticales, qui sont inatteignables à plus bas champ magnétique."
Les images produites par Iseult sont dix fois plus précises que celles obtenues avec un IRM classique, cela grâce à l'élément de base de tout IRM : l'aimant qui produit un champ magnétique. L'aimant hors normes d'Iseult pèse 132 tonnes et, alors qu'un IRM à l'hôpital crée un champ magnétique de 1,5 à 3 Tesla, celui d'Iseult monte à 11,7 Tesla.
"On a développé un microscope, maintenant on va voir ce qu'on peut trouver"
Plus de 20 ans de recherche et développement ont été nécessaires pour mettre au point Iseult, appareil unique au monde, qui a fédéré une équipe de 200 personnes. Les résultats du premier protocole mené avec des volontaires sont prometteurs. Ils ont été salués par le président Emmanuel Macron lors de l'inauguration en avril, un grand moment de fierté pour Nicolas Boulant : "C'était vraiment le couronnement de toutes ces années où on a sué, où on a eu des larmes pour atteindre cet objectif lointain, qui était de passer les premières personnes dans cet IRM pour faire ces images."
Cette prouesse scientifique est un "pari" sur l'avenir, explique le scientifique : "On est des explorateurs, estime-t-il, on a développé un microscope, maintenant on va voir ce qu'on peut trouver. On peut faire le parallèle avec les télescopes surpuissants."
"Bien sûr on a des idées, mais là, on espère mieux comprendre certaines maladies neuro-dégénératives, comme la maladie de Parkinson ou la sclérose en plaques."
Nicolas Boulant, directeur de recherche au CEAà franceinfo
Les scientifiques espèrent pouvoir vérifier leurs hypothèses de recherche en explorant plus précisément les neurones en action et les couches corticales, "pour mieux comprendre leur comportement et leur rôle".
L'appareil restera pour l'instant au CEA et n'est pas encore un prototype en vue d'une multiplication vers le grand public. "Il n'a pas pour ambition de faire des diagnostics", précise Nicolas Boulant, mais "d'apprendre comment fonctionne le cerveau, qu'il soit sain ou pathologique". Ce sont ensuite ces connaissances qui pourront peut-être aider les médecins dans leurs diagnostics et leurs traitements. "On est loin de tout comprendre, par exemple sur la maladie de Parkinson, on peut voir des manifestations de cette pathologie dans les images actuelles, mais souvent trop tard. D'avoir un outil plus puissant permettra peut-être de pouvoir déceler et détecter, de nous aider à comprendre l'évolution ou mieux suivre l'effet de certains médicaments."
Pour rendre l'IRM encore plus performant d'autres tests seront réalisés sur d'autres volontaires prochainement.
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