Le débat sur l'euthanasie, "la piqure libératrice" (1946)
Retour à la fin de l’année 1946. L’émission "Réponse à Tout" qui se tient en public est consacrée aux relations pour le moins tendues entre la médecine officielle et les charlatans. Mais une question d’une spectatrice engage un débat qui n’était pas prévu au départ:
"Un docteur peut-il, sachant un malade incurable et en proie à de grandes souffrances, hâter sa mort par une piqure libératrice ?"
C’est un thème fortement débattu à l’époque. Peut-être marquée par les souffrances de la guerre, la société française paraît vouloir se réapproprier son propre corps et quoi de plus fort symboliquement que de décider de mourir en cas de souffrance insoutenable et d’une mort certaine?
Les médecins sont sur cette longueur d’onde comme le prouve la réponse du célèbre médecin Louis Pasteur Valery-Radot PASTEUR, le petit-fils de Louis Pasteur, résistant pendant la guerre, académicien. Quelqu’un de prestigieux et de très écouté.
"La question est mal posée, madame. Ce n'est "hâter la mort" qu'il faudrait dire mais "l'empêcher de souffrir", et l'empêcher de souffrir, certainement oui."
Louis Pasteur Valery-Radot reprend en fait presque mots pour mots ceux de Francis Bacon, qui a crée au début du XVIIème siècle le terme "euthanasie" et qu’il défend ainsi :
"L’office du médecin n’est pas seulement de rétablir la santé, mais aussi d’adoucir les douleurs et souffrances attachées aux maladies ; et cela non pas seulement en tant que cet adoucissement de la douleur, considérée comme un symptôme périlleux, contribue et conduit à la convalescence, mais encore afin de procurer au malade, lorsqu’il n’y a plus d’espérance, une mort douce et paisible"
Si la justice a souvent été clémente avec les personnes ayant abrégé les souffrances de leurs proches, elle l'est nettement moins avec les médecins.
Parce qu’elle bouleverse profondément le rôle de la médecine, transgresse un interdit -celui de donner la mort- qu’elle contrevient au discours des Eglises, et parce qu’elle pourrait cacher des meurtres, les parlementaires n’ont pas souhaité légaliser l’euthanasie active, qui reste pour ses défenseurs, l’ultime liberté à conquérir.
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