Français du monde. La Belgique, aspirateur à exilés fiscaux français ?
Les Français seraient toujours plus nombreux à s'expatrier pour des raisons fiscales d'après le dernier rapport de Bercy. A 1h20 de Paris seulement, Bruxelles fait figure de destination privilégiée. Tous les Français de Belgique sont-ils des exilés fiscaux ? Pas si sûr.
Bienvenue dans un monde de moquette épaisse et de portes capitonnées. Fabrice de Boissieu dirige la filiale de la Banque Transatlantique à Bruxelles. Ses clients : une centaine de familles fortunées, moitié françaises, moitié belges. En Belgique, les Français expatriés sont 300.000 environ. Et parmi eux, très peu ont franchi la frontière pour des raisons fiscales : « vous avez déjà 70.000 travailleurs frontaliers, détaille-t-il, 20 à 30.000 étudiants, parce que c'est plus facile ici, en particulier en médecine, il n'y aura un numerus clausus qu'à partir de l'an prochain, et tout un contingent de déshérités, parce que le traitement social est plus agréable et plus familial en Belgique, et les structures plus adaptées. L'exil fiscal ne concernerait que 2 à 3 000 personnes, soit 1 % de la population expatriée. »
Né dans une grande famille de Rhône-Alpes, Fabrice de Boissieu vit à Bruxelles depuis début 1999, et l'arrivée de l'euro en Belgique. Aujourd'hui, le secteur de la banque est bien malmené : « En 15 ans, on a fermé en Belgique 40 % des agences, encore plus qu'en France. Les effectifs perdent un peu plus d'1 % par an, et ça va s'accélérer. Parce qu'on automatise, parce que le boom des emplois dans les années 70-80. On n'a plus besoin des mêmes personnes, dans le contexte de taux de crédit bas. »
La Belgique n'est pas pour autant en proie à la morosité, et continue de créer de la croissance, en particulier dans le secteur des services. « Ça reste un petit pays qui bénéficie de choses très positives notamment ses institutions européennes, un vrai moteur avec tout ce qui est autour : qualité de vie, État-providence. Bruxelles est une capitale de province, moins lourde, avec des dimensions plus faciles, on perd moins de temps, c'est plus simple. »
Un an et demi sans gouvernement
La Belgique est un pays récent, sa création remonte à 1830 seulement. Politiquement, c'est un vrai casse-tête, le royaume de 11 millions d'habitants est divisé en trois régions souvent en bisbille : Bruxelles, la Flandre et la Wallonie, qui a fait parler d'elle dans le monde entier le mois dernier en bloquant plusieurs jours durant la signature du Traité de libre-échange CETA Europe-Canada « Les Belges sont pragmatiques témoigne Fabrice de Boissieu, ils savent se retrouver et utiliser quelquefois une capacité à se faire entendre pour obtenir autre chose. C'est ce qui s'est passé. Ça leur a fait une belle campagne de pub et de notoriété, et ils se sont fait l'écho de ce qu'un certain nombre de personnes pensaient tout bas. »
Signe de ces tensions, la Belgique a passé un an et demi, 541 jours, sans gouvernement, mais le pays a toujours continué à fonctionner : « Ça ne les a pas empêchés de traiter les affaires courantes au jour le jour, et même importantes : ils ont déclaré deux fois la guerre. Le Roi, avec l'accord de tous, a outrepassé ses pouvoirs. » Comme beaucoup de Français, Fabrice de Boissieu vit à Uccle, une des communes du Grand Bruxelles. Père de 4 filles éparpillées dans un grand cabinet d'avocats au Maroc pour l'une, en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux États-Unis pour les trois autres, il appartient à une troupe de théâtre amateur, mélange de Belges et d'autres communautés. Ils sont 3 à 400 et chaque année donnent un spectacle au profit d'une association caritative.
Aller plus loin
La Banque Transatlantique Belgium
L'UFE (Union des Français de l'étranger) Belgique
Retrouvez ce portrait dans le numéro 564 de la Voix de France, le magazine de l'UFE
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