Elizabeth Royer-Grimblat,galeriste et historienne de l'art, a comme spécialité la traque des œuvresspoliées lors de la deuxième Guerre mondiale. Elle connaît donc bien cetteaffaire Gurlitt : "le père de celuiqui vient de mourir était un recycleur de tableaux spoliés à partir des annéestrente. Son fils a gardé la collection de tableaux achetés d'une façon normaleet d'autres de façon illicite. Cela a redéclenché en Amérique et en Europe lesujet des spoliations qui avaient été oublié."A l'occasion d'une enquête pourfraude fiscale, en novembre 2013, les autorités allemandes (il vivait à Munich)découvrent des toiles de Chagall, Matisse, Picasso ou Renoir. Parmi ces œuvres,il y a, par exemple, La Femme assised'Henri Matisse, volé en 1941 au grand collectionneur Paul Rosenberg (legrand-père de la journaliste Anne Sinclair). Décédé cette semaine, CorneliusGurlitt avait conclu un accord pour restituer certaines de ces œuvres.Pour les identifier, ElizabethRoyer-Grimblat explique qu'il faut d'abord vérifier toutes les sources enallant dans les musées pour vérifier ce qui a été écrit. Mais "on s'aperçoit qu'il y a beaucoupd'erreurs ou d'oublis, parfois pour occulter une présence dérangeante ".Reste à savoir si le tableau est faux ou s'il s'agit bien d'un original. "On ne voit pas tout de suite ladifférence ", confirme la galeriste. "La première impression est souvent la bonne et ensuite, on fait desrecherches. Le plus important est d'étudier le tableau et de comprendre lamatière. "Diplômée d'histoire de l'art dansles années 80, elle est vite partie à Londres pour pister des œuvres. "Je suis partie à Londres pour fairedes recherches. J'ai toujours aimé rechercher ce qu'il y avait derrière lessignatures qui n'étaient pas toujours les bonnes. Voir l'invisible ! "Ala question de Jean-Pierre Elkabbach, elle répond qu'elle n'est pas juive "mais tous ces tableaux, en dehors dela spoliation, sont des histoires de familles et ils révèlent toujours autrechose ".Sa première enquête date de 1996.Elle la mène pour les ayants droits d'Alphonse Kann. Avec son petit-neveu,Francis Warin, "nous avons cherchédes tableaux parce que les familles spoliées se sont aperçues que des documentsau ministère des Affaires étrangères pouvaient permettre d'identifier destableaux. Dans ces Musées Nationaux Récupération, on s'est aperçu qu'il y avaitdes œuvres au passé assez flou. " Elle travaille alors avec la ministreAurélie Filippetti qui a décidé de trouver les propriétaires de 2.000 œuvres.Elle a ainsi pu restituer unetrentaine d'œuvres à des familles*. "On est toujours fier parce que c'est un combat, "** ajoute-t-elle.