Expliquez-nous... le concept de guerre de civilisation
La conjonction des mots "guerre" et "civilisation" est devenue politiquement très sensible parce qu'employée par les néoconservateurs americains qui ont mené la politique étrangère des Etats-Unis au debut des années 2000. L'expression "guerre de civilisation" vient d'un livre celui de Samuel Huntington Le Choc des civilisations paru en 1996, très controversé depuis. Huntington décrit un nouveau modèle dans les relations internationales après l'effondrement du bloc soviétique à la fin des années 1980. Un modèle où, entre autres, les religions prendront une part importante. Avant Huntington, l'universitaire britannique Bernard Lewis avait utilisé l'expression. Il écrivait en 1964 que "la crise au Proche-Orient ne surgit pas d’une querelle entre états, mais d’un choc des civilisations ". Bernard Lewis développe une vision réductrice des musulmans qui globalement rejetteraient selon lui la liberté et la démocratie. Ce sont donc ces concepts qu'ont utilisés les néo-conservateurs américains après le 11 septembre 2001.
Ce ne sont évidemment pas les références de Manuel Valls.
Manuel Valls a d'ailleurs pris soin de préciser que cette "guerre de civilisation " se situe "aussi au sein de l'islam ". Entre d'un côté un islam aux valeurs humanistes, universelles et de l'autre un islamisme obscurantiste et totalitaire.La droite s'est elle empressée de voir ces propos comme un alignement sur le vocabulaire de Nicolas Sarkozy quand en janvier dernier quand il avait estimé après les attentats contre Charlie que la guerre était declarée contre notre civilisation.
Pourquoi cette idée de guerre de civilisation revient-elle régulièrement ?
Un historien écrivait en 2004 que cet arrière-fond historique nous parle à notre insu. L'historien evoquait notamment les croisades du Moyen Age, le temps du Turc redouté et détesté puis le temps de la colonisation et ses violences et celui de la décolonisation souvent sanglante. Pour l'historien cette confrontation, ancienne et récurrente, a sédimenté dans les consciences des peuples. On peut imaginer qu'il est alors tentant pour un politique de surfer sur cette idée et d'utiliser cette expression à géometrie variable.
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