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La Bosnie-Herzégovine au bord de l’implosion

26 ans après, les stigmates de la guerre civile sont encore visibles un peu partout. L’éclatement sanglant de la Yougoslavie et l’épuration ethnique à l’œuvre durant le conflit des années 1990 a divisé l’État bosnien en deux entités : d’un côté la fédération croato-musulmane et de l’autre la République serbe de Bosnie. Une construction de plus en plus fragile.

Article rédigé par franceinfo - Louis Seiller , édité par Ariane Schwab
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Une Bosniaque lit des prières parmi les tombes des victimes du massacre de Srebrenica perpétré en 1995 par les forces serbes (illustration). (ELVIS BARUKCIC / AFP)

Depuis quelques semaines, la situation politique en Bosnie-Herzégovine s’est considérablement dégradée. On parle même de risque d’implosion de l’État fédéral. Il faut savoir que depuis 30 ans, ce sont les partis ethno-nationalistes qui ont dirigé le pays sans interruption et pour se maintenir au pouvoir, ils n’ont cessé d’attiser les divisions entre Bosniaques musulmans, Serbes orthodoxes et Croates catholiques.

Le chef nationaliste serbe, Milorad Dodik, menace depuis plus de 15 ans par exemple de faire sécession et il semble maintenant être passé aux actes puisqu’il a récemment annoncé vouloir créer des institutions parallèles à l’État fédéral pour la République serbe, avec notamment une justice, un fisc et surtout une armée autonome.

Le spectre de Srebrenica

Les nationalistes serbes n’ont pas du tout apprécié une loi qu’a fait passer cet été le haut représentant des internationaux à Sarajevo. Avant de quitter son poste, ce haut représentant, qui dispose d’importants pouvoirs prévus par les accords de paix, a décidé de sanctionner la négation du génocide de Srebrenica, l’un des pires massacres de la guerre, en juillet 1995 : plus de 8 000 hommes et adolescents ont été tués par les forces serbes. Ce massacre a été qualifié de génocide par la justice internationale, mais côté serbe, on continue de le nier ou de le minimiser.

Cette loi a en tout cas servi de prétexte aux dirigeants serbes pour engager la sécession de la République serbe. Une option que soutient, par exemple, Dragana. "Pourquoi ne pas faire cette sécession ? interroge la coiffeuse installée à Pale, l’ancienne capitale des Serbes. C’était la même chose avec la guerre : les musulmans voulaient leur pays et nous le nôtre. Aujourd’hui, on n’entend que parler de Srebrenica tout le temps et ça ne fait que semer plus de haine."

"Il faudrait qu’on se sépare pour en finir."

Dragana, une coiffeuse serbe  

à franceinfo

Avec la montée de ces tensions politiques et des discours communautaires, certains craignent un retour des violences. La situation inquiète beaucoup et les médias locaux évoquent tous les jours les risques de conflit. Cette inquiétude est surtout présente dans les campagnes où les populations sont encore mélangées.

Hatidza par exemple habite un village situé sur la ligne de démarcation qui sépare les deux entités du pays. "Ici, on n’a aucun problème entre Serbes et musulmans, on vit comme des citoyens, assure-t-elle. Mais quand on écoute les discours politiques, on ne sait pas ce qu’il faut croire. J'avais quatorze ans quand la dernière guerre a éclaté et maintenant certains aimeraient en préparer une autre", s’inquiète Hatidza.

Terminée il y a tout juste 26 ans, la guerre de Bosnie-Herzégovine a fait plus de 100 000 morts et plus de deux millions de déplacés.

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