Cet article date de plus d'un an.

"C'est allé trop loin" : face aux dérives du tourisme de masse, Amsterdam envisage de délocaliser son célèbre Quartier Rouge

La municipalité envisage de délocaliser le Quartier Rouge, tant les dérives du tourisme de masse agacent les riverains, mais le projet divise.
Article rédigé par franceinfo - Jean-Jacques Héry
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
La municipalité d'Amsterdam, confrontée à un tourisme de masse avec 20 millions de visiteurs par an, souhaite changer l'image de la ville. (KOEN VAN WEEL / ANP)

Le Quartier Rouge d'Amsterdam, cette zone en plein centre-ville célèbre pour ses prostituées en vitrine pourrait bientôt déménager. La municipalité, confrontée à un tourisme de masse avec 20 millions de visiteurs par an, souhaite changer l'image de la ville. Elle souhaite ne plus être considérée comme une des capitales européennes de la fête, du sexe et de la drogue pour mettre en valeur ses musées, ses canaux et son architecture. Récemment, la ville a même lancé une campagne publicitaire en ligne destinée à dissuader les jeunes Britanniques de venir faire la fête le week-end à Amsterdam.

>> Lassée de l'image "sexe, drogue et alcool", Amsterdam fait la chasse aux touristes indisciplinés

C'est donc une révolution touristique qui est en marche. Le vendredi ou samedi soir, il est, en effet, parfois très compliqué d'avancer le long des canaux tant le monde est agglutiné entre les néons roses, les bars et les peep shows. Olav, qui vit juste à côté, décrit ce qui est devenu la principale attraction touristique de la ville : "Le Quartier Rouge est une association entre la prostitution en vitrine, les coffee shops, les cafés et cela attire les touristes comme un aimant. Il ne s'agit pas seulement de la prostitution en vitrine."

"Il faut changer l'ensemble de l'offre dans ce quartier si l'on souhaite lutter contre ce tourisme de masse dont on ne veut pas."

Olav, habitant du quartier rouge d'Amsterdam

à franceinfo

Aujourd'hui, la mairie ne veut plus attirer les fêtards, mais des visiteurs intéressés par les musées et l'architecture de la ville. "C'est allé trop loin : les enterrements de vie de garçons, les gens qui urinent dans les jardinières", constate Ilana Rooderkerk qui siège au Conseil municipal pour le parti social-libéral, D66. "Des mesures ont donc été prises, enchaîne l'élue : fumer du cannabis dans la rue est interdit dans le centre de la ville et les bars ferment également plus tôt, à deux heures du matin. Et puis, il y aura un centre érotique dans une autre partie de la ville, de manière à pouvoir fermer et déménager les vitrines du Quartier Rouge."

Opposition des travailleuses et travailleurs du sexe

Mais ce déménagement n'a pas la faveur des travailleuses du sexe. Leur premier argument est qu'il n'y aura pas assez de place pour toutes les professionnelles dans ce nouveau centre érotique. Ensuite, disent-elles, il sera plus dangereux d'aller travailler loin du centre-ville puisque dans le Quartier Rouge, les patrouilles de police sont nombreuses. Et puis, très concrètement, elles estiment qu'un déménagement ferait baisser leurs revenus.

Phoebe est travailleuse du sexe et coordinatrice au Centre d'Information sur la prostitution, elle y voit une attaque de plus contre une profession qu'on cherche à marginaliser : "Les travailleurs et travailleuses du sexe sont un bouc émissaire parfait. Il y a eu des campagnes massives pour attirer les touristes ! Cela explique sans doute plus le nombre de visiteurs ici que la présence des professionnelles et professionnels du sexe. Cela traduit clairement une montée des idées conservatrices et chrétiennes. Aux Pays-Bas, les lois et les règles administratives vont aller de plus en plus loin pour compliquer la vie des professionnels du sexe."

Reste que le centre érotique est encore loin d'être construit : le projet se heurte à une forte opposition... des riverains sur les sites envisagés.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.