Remaniement : une décision ne se prend jamais sans regret, nous enseigne la philosophie
"Heureusement, la plupart du temps, dans la vie il n’y a pas de décision à prendre, elle suit son cours comme une rivière", explique ainsi Alexandre Lacroix, directeur de la rédaction de Philosophie Magazine, jeudi 11 janvier. Selon lui "quand intervient une décision c’est qu’il y a en amont une crise, un problème à régler". C'est d'ailleurs, rappelle Alexandre Lacroix, parce que les humains ne sont pas des rivières, qu'ils sont amenés à devoir choisir de prendre un chemin plutôt qu’un autre, à la croisée des chemins. Et la décision renvoie aux responsabilités qui découlent de cette humanité. Quoi de plus angoissant ?
Et surtout, quel philosophe écouter au moment de décider ? Faudrait-il suivre les préconisations de Thomas Hobbes selon lequel c’est le désir qui devrait être le moteur de nos destins, ou au contraire le très rationaliste Descartes pour qui il faudrait toujours choisir le chemin le plus sûr. Faut-il suivre nos aspirations ou calculer nos chances de réussite ?
Alexandre Lacroix de son côté invite à "faire le choix de la joie" en écoutant Spinoza, pour qui une bonne décision serait celle "qui rend l’humain joyeux". La joie et la tristesse comme guides décisionnels, "un peu comme dans un jeu où vous tâtonnez et où l’on vous dit tu brûles ou tu refroidis", poursuit le directeur de la rédaction de Philosophie Magazine.
Quoi qu'il en soit, la décision ne va jamais sans regrets. Regrets et décisions, ces deux vieux copains qui tentent parfois de prendre de la distance mais dont le destin est inextricablement lié. Les deux faces d'une même pièce. Comme l’écrit Alexandre Lacroix, "l’erreur la plus commune est de chercher à faire un choix qu’on ne regrettera pas, comme cet enfant qui voudrait jouer en gagnant à tous les coups".
"Accepter l'intensité des regrets"
Mais alors comment choisir ? Qu’on parle d’amour, de travail, de lieu de vie, ou de portefeuilles ministériels, faire le choix du changement, c’est "accepter l’intensité des regrets" puisqu’il faut "se détacher d’un bloc entier du passé". Alors qu’en ne modifiant rien, "on opte pour un regret vague de ce qui aurait pu être et n’a pas été. Des regrets plus doux, supportables mais pas forcément moins destructeurs", écrit Alexandre Lacroix qui invite à se décider non pas en fonction de l’intensité des regrets, mais en fonction "du genre de regrets à supporter", en se posant cette question cruciale : à quoi suis-je capable de renoncer ?
Puisqu'il faudra nécessairement renoncer. Après tout, pour trouver l'origine du mot "décision" il faut remonter au verbe latin "Decidere" qui signifie couper, trancher. Or, en tranchant, une décision laisse toujours une cicatrice. Décider, c’est accepter de vivre avec cette cicatrice.
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