Ariane Lavrilleux : la journaliste présentée à un juge des libertés et de la détention

La journaliste a été remise en liberté mercredi dernier après 48 heures de garde à vue dans une enquête sur ses articles sur un possible détournement par l'Egypte d'une opération de renseignement française. Une mesure coercitive rarissime qui a indigné la profession.
Article rédigé par Marie Dupin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Paris, 21 septembre. La journaliste d'investigation française Anne Lavrilleux en conférence de presse dans les locaux de l'ONG Reporter Sans Frontières, dénonce "une attaque claire, nette et précise contre la liberté d'informer", après avoir passé près de 40 heures en garde à vue. (THOMAS SAMSON / AFP)

La journaliste d'investigation Ariane Lavrilleux est convoquée ce lundi matin à 9h30 au tribunal de grande instance de Paris pour être présentée devant le juge des libertés et de la détention (JLD), a appris franceinfo auprès d'une source proche du dossier.

>> Journaliste placée en garde à vue : "C'est une attaque claire, nette et précise contre la liberté d'informer", s'indigne Ariane Lavrilleux

Après la perquisition au domicile de la journaliste, puis sa garde à vue, le juge devra décider si les documents saisis peuvent être versés à la procédure engagée contre la journaliste accusée de divulgation d’un secret de défense nationale. Elle est à l’une des actrices d'une enquête collective pour France 2 et Disclose au sujet de la face sombre de la coopération franco-égyptienne.

Mardi 19 septembre, son domicile a été perquisitionné à 6h du matin par neuf agents des renseignements français, armés de moyens de surveillance ultra sophistiqués, dont trois valises informatiques capables de copier en quelques minutes des tonnes de gigadonnées. Objectif : traquer les sources de cette journaliste. Ariane Lavrilleux est aujourd'hui accusée de divulgation d’un secret de défense nationale : une opération militaire secrète, dont on comprend aisément que l'Etat aurait aimé qu'elle reste secrète puisqu'elle a permis au grand public de découvrir comment la France, en fournissant du renseignement à l’Egypte, l'a aidé à réprimer et bombarder sa population.

Quelle protection pour les sources ?

C'est donc le droit à la protection des sources pour les journalistes et le droit des citoyens à être informés sur des questions d’intérêt général qui se joue devant le tribunal : si un juge français décide que des documents saisis chez une journaliste peuvent être utilisés contre elle, et contre ses sources, qui osera encore prendre le risque de dévoiler des informations qui méritent d’être connues de tous ? Les fonctionnaires, les agents de l’Etat, poussés à parler parce qu’ils ne peuvent plus se taire oseront-il encore dénoncer les faits délictueux dont ils ont connaissance ? Les journalistes pourront-ils encore enquêter sur la politique étrangère de la France, ses contrats d’armement, et tant d’autres sujets ?

Après la garde à vue d'Ariane Lavrilleux, Disclose a précisé mercredi dernier, sur X (anciennement Twitter), que selon ses informations, "les enquêteurs de la DGSI reprochent à (la) journaliste d'avoir signé cinq articles sur les ventes d'armes françaises à l'étranger, publiés dans le média depuis 2019". Lors d'une conférence de presse jeudi après-midi au siège de Reporters sans frontières à Paris, Ariane Lavrilleux s'est indignée qu'un "nouveau cap" ait été franchi contre la liberté d'informer, dénonçant un "détournement des services de la justice". Par ailleurs, un ex-militaire a été mis en examen jeudi à Paris, suspecté d'avoir renseigné la journaliste. 

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