Ils préparent le vin de demain
"Nous nous sommes toujours adaptés à des situations hautement plus
catastrophiques que le réchauffement climatique." D'entrée de jeu, Jean-Philippe
Roby, directeur adjoint du département Recherche de l'Institut scientifique de
la vigne et du vin (ISVV), veut dédramatiser. Et de citer le phylloxera "qui a
détruit 80% du vignoble europeen en 4 ans" . Avec le climat le "pas de temps"
pour réagir est selon lui beaucoup plus ample, une trentaine d'années. Jusqu'à
présent, en tout cas dans le Bordelais, le réchauffement a été une aubaine. La
décennie 2000-2010 a fourni une série de grands millésimes. "Il faut voir
jusqu'où ça ira" met toutefois en garde Denis Dubourdieu, directeur général de
l'Institut.
Des cépages du Sud testés dans le Bordelais
Et si l'on en croit l'étude tout recemment publiée par le climatologue
Herve Le Treut, ça ira assez loin. En 2100, il envisage ainsi des vendanges
avancées de 40 jours pour le merlot, soit début août. Le risque est d'avoir des
raisins trop sucrés, qui donnent ensuite du vin trop alcoolisé. D'ou l'intérêt
des recherches conduites à l'ISVV.
Depuis 2009, 52 cépages y sont testés sur une parcelle expérimentale. Des
cépages notamment venus de la Méditerranée, Portugal, Italie ou Grèce. Trois
fois par semaine des échantillons de raisin sont soigneusement prélevés, pesés,
pressés, centrifugés et analysés. Il s'agit de voir comment ces cépage se
comportent en Gironde. Pour peut-être les y exploiter à l'avenir, en cas de coup
de chaud.
Machine à "désalcooliser" le vin
Mais ce n'est pas la seule option. Face à un soleil de plomb, Pierre-Louis
Teissedre, professeur d'œnologie à l'Université de Bordeaux Segalen, évoque la
possibilité de couvrir la vigne de pergolas, pour lui faire de l'ombre. Tout
l'enjeu est de limiter la production de sucre via la photosynthèse. Il imagine
aussi des "doubles vendanges" : une plus tôt dans la saison avec des raisins peu
alcoolisés et plus acides, une autre avec le raisin plus mûr. L'association des
deux pouvant équilibrer le futur vin.
Plus en aval, il existe également des
techniques pour "désalcooliser" un vin. Des machines utilisant par exemple
l'osmose inverse. Et ce n'est pas de la science-fiction. Un règlement européen a
récemment donné le feu vert à une extension de cette pratique.
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