Ça nous marque. Brittany Ferries : "Un Brexit sans accord serait une catastrophe pour le Transmanche français"
Brittany Ferries est une compagnie maritime bretonne de transport de passagers et de véhicules entre la Bretagne, la Normandie, le sud de l'Angleterre, l'Irlande et l'Espagne. Le groupe doit faire face aujourd'hui aux problèmes liés au Brexit en cas de sortie sans accord, et depuis une semaine, à une baisse des réservations passagers pour cause de coronavirus.
Brittany Ferries est une compagnie maritime bretonne et non britannique. Elle est installée à Roscoff depuis 45 ans, emploie 2 800 salariés et possède une flotte de 12 navires. La compagnie transporte 2,5 millions de passagers par an entre les ports bretons, normands, anglais, irlandais mais aussi espagnols.
Une entreprise créée en 1973 par un agriculteur
Brittany Ferries voit le jour au début de 1973, juste avant l'entrée du Royaume-Uni dans l'Union européenne. Elle est fondée par un agriculteur et un entrepreneur, Alexis Gourvennec. Son idée est issue d'un groupe de réflexion qui militait auprès du gouvernement pour que la Bretagne puisse s'équiper d'outils de désenclavement. Le port de Roscoff faisait partie de ce plan de désenclavement, et en 1972, Alexis Gourvennec, ne trouvant aucun armateur pour desservir la ligne Roscoff-Plymouth, achète un premier bateau.
Une ambition économique pour la Bretagne, selon Jean-Marc Roué, président du groupe Brittany Ferries. "Les actionnaires de Brittany Ferries pour résumer, c'est la marque 'Prince de Bretagne', en fait. Il fallait aller, soit en Belgique, soit au nord de la France pour pouvoir trouver le même équipement pour transporter les choux-fleurs bretons. Pour le coup, en le faisant à Roscoff,on allait directement à Plymouth !"
Un nom anglais mais une marque 100% bretonne
"En 1974, explique Jean-Marc Roué, le nom anglais de 'Brittany Ferries' est adopté, car la société est inscrite au registre du tribunal de commerce de Brest au nom de S.A BAI, comme diminutif de Bretagne, Angleterre, Irlande. En fait, les Anglais n'arrivaient pas à prononcer ce nom et comme la compagnie transportait environ 85% de passagers britanniques sur le Transmanche et presque 100% sur le Transgascogne, le nom est donc devenu très rapidement la Bretagne par le ferry, Brittany Ferries. Concrètement, beaucoup pensent que nous sommes une société à capitaux britanniques, on ne leur dit pas trop fort, mais en fait c'est 100% breton !"
1994 : ouverture du tunnel sous la Manche
Brittany Ferries ne disparaît pas mais avec l'ouverture du tunnel, puis la crise de 2008, le nombre de bateaux et d'opérateurs présents aujourd'hui sur le Transmanche de Dunkerque à Roscoff n'est plus que de 3. Ils étaient 7 auparavant. Un modèle économique qui a bien résisté, explique Jean-Marc Roué.
Nos actionnaires, qui sont des agriculteurs, sont déjà des propriétaires d'entreprises qui génèrent le revenu de leurs familles. Mon objectif prioritaire, c'est le développement du territoire, plus que le maximum de rentabilité.
Jean-Marc Roué, Brittany Ferries
L'impact économique d'un Brexit sans accord et du Covid-19
"Sur la semaine écoulée, comparée à la semaine de l'an passé, je fais moins 25% en réservation, précise le patron de la compagnie, donc il y a un impact. Et surtout, chez Brittany Ferries, nous avons un nombre très important de scolaires qui partent par le bus en voyage linguistique en Angleterre, et là, on a déjà 40.000 passagers annulés sur les groupes, donc oui, on est impacté par le coronavirus. Et vraisemblablement ça va durer un peu."
"Le Brexit, une sortie sans accord, ce serait une catastrophe pour le Transmanche français, donc pour Brittany Ferries. Si il y a un dispositif sans accord, on aura des procédures douanières qu'on ne fait pas du tout aujourd'hui pour le transport de marchandises. Le flux sera ralenti.
Pour les passagers, ça ne va pas changer beaucoup, car la Grande-Bretagne et l'Irlande ne sont jamais rentrées dans l'espace Schengen, donc on a toujours eu des contrôles douaniers au passage. Les ports normands, les ports de la Manche centrale et ouest sont plutôt des solutions que des problèmes, les volumes que nous traitons sont faibles : 200 000 camions par an sur 5 ports."
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