"Ça ouvre toutes les portes, c'est vraiment formidable" : à la rencontre de Mathieu Pradinaud, repéreur de décors naturels pour le cinéma et les séries
"Je veux bien jeter un œil aux jardins, c'est possible ?" Cette phrase, Mathieu Pradinaud a dû la prononcer des centaines de fois. Depuis 25 ans, il exerce un métier indispensable dans le monde du cinéma : repéreur de décors naturels. C'est lui qui repère en amont le bon endroit pour tourner un film ou une série.
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Et ce matin-là, c'est dans les dédales de l'immense école des Beaux-Arts de Paris qu'il a donné rendez-vous à franceinfo. Il fait du repérage pour la prochaine série française d'une plateforme de streaming américaine : l'histoire du tout premier chef cuisinier au monde, Antonin Carême. Le casting s'annonce plutôt pas mal : Benjamin Voisin, Lyna Khoudri et Jérémie Renier. Il faut maintenant trouver le décor, avec une contrainte : l'histoire se déroule au début du 19e siècle ! "Je regarde plutôt des lieux qui ont gardé leur patine, confie Mathieu Pradinaud. Ici, tu peux être en 1800 sans trop de problèmes !"
Autour de nous, pourtant, dans cette belle rue pavée, il y a des camionnettes, des poubelles très 2023, mais il voit complètement où il va. "Il y a plein d'axes qui fonctionnent où on peut ne pas filmer ces trucs moches. Il faut un peu d'imagination !"
"Il y a un travail de projection en fonction de chaque scénario."
Mathieu Pradinaud, repéreur de décors naturelsà franceinfo
"S'il y a 100 figurants, des échoppes un peu partout, des calèches qui passent dans un sens et dans l'autre, un peu de gravier au sol pour cacher les carrés un peu trop modernes, ça fonctionne !", assure l'expert.
On change de lieu ensuite, pour visiter un hôtel particulier avec une cour et de l'autre côté un jardin. "Ça, c'est magnifique ! C'est vachement beau", s'enthousiasme Matthieu. Mais l'esthétique ne fait pas tout. Il faut déjà faire coïncider les calendriers. "Nous, c'est simple, c'est la semaine du Nouvel An", tranche le gérant. "L'enfer", souffle discrètement Mathieu.
Et puis après le calendrier, il y a aussi la question du coût. "Il y a des décors que tu ne vas pas voir parce que tu sais que ça coûte trop cher", reconnaît le professionnel. À l'inverse, dans certains lieux, "tu sais qu'il y a déjà eu des tournages, qu'ils sont cinéma-friendly et donc qu'ils ne vont pas t'assommer."
Pour le film "Tirailleurs", "plus de 350 villages" ont été visités
"J'aime ce métier parce que ce n'est jamais le même travail", explique Mathieu Pradinaud, dont les missions sont très différentes. Il se souvient de son "repérage sauvage" pour le film Tirailleurs, avec Omar Sy. "Il fallait trouver un village censé être en 1914, et où il y ait le moins de choses à faire dans le décor. J'ai visité plus de 350 villages !", fait-il remarquer.
"Tu peux pas regarder sur Internet des photos de tous les villages. Alors, j'ai pris mon appareil photo, mon ordinateur, mon sac. Et au fil des recherches, tu vois le village parfait, tu sais que c'est là !"
Mathieu Pradinaudà franceinfo
Ensuite, "il faut envoyer à ton équipe, ils viennent, et quand c'est validé, on tourne là !" Matthieu Pradinaud visite encore une nouvelle pièce, et voit tout de suite le potentiel. "C'est vachement bien, ça peut faire une chambre !" Le mieux dans son métier ? "Le fait que ça ouvre toutes les portes, c'est vraiment formidable", reconnaît-il. On l'abandonne à sa séance photo. Une de plus pour trouver le décor parfait.
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