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C'est dans ma tête. Parents en deuil : quels congés quand on perd un enfant ?

Le rejet du projet de loi allongeant la durée du congé de deuil pour les parents qui viennent de perdre un enfant, a suscité l'indignation. Le gouvernement a reculé et opté pour une concertation. La psychanalyste Claude Halmos souligne l'utilité réelle et la dimension symbolique du congé de deuil après le décès d'un enfant. 

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
"Perdre un enfant est probablement la pire chose qui puisse arriver à un être humain". (Photo d'illustration).  (GETTY IMAGES)

Un projet de loi qui proposait de porter de 5 à 12 jours le congé de deuil pour les parents qui viennent de perdre leur enfant, a été repoussé le 30 janvier dernier par l’Assemblée nationale. Devant le tollé provoqué par ce refus, l’exécutif a reculé, et prôné une concertation. Le Président de la République lui-même est intervenu.

franceinfo : Quel rôle joue ce congé de deuil, et quel est l’intérêt de son allongement de 5 à 12 jours ?       

Claude Halmos : Compte tenu de ce que représente, pour un parent, la mort de son enfant, un congé de 12 jours, est vraiment le moins que l’on puisse faire. Et le refus de ces 12 jours montre que l’on ne mesure pas la gravité de ce dont il s’agit : perdre un enfant est probablement la pire chose qui puisse arriver à un être humain.        

Vous pouvez nous expliquer pourquoi ?        

Voir mourir une personne âgée est douloureux, mais l’idée que c’est dans l’ordre des choses, peut apporter un apaisement. De la même façon on peut se dire, de la mort d’un adulte jeune, qu’elle est une exception, et que la normalité des choses demeure. Mais la mort d’un enfant est un non-sens absolu : comment accepter que l’on meure avant même d’avoir vécu ? Elle est d’une violence inimaginable ; et elle fait s’écrouler les parents.

D’une part parce que, à la douleur, sans limites, de la perte s’ajoute en général la culpabilité : les parents se sentent toujours coupables de ce qui arrive à leurs enfants, même s’ils n’y sont pour rien. Et d’autre part parce que le parent est confronté au fait - inconcevable - que cet enfant qui devait d’une certaine façon, prolonger quelque chose de lui, quand il ne serait plus là, meurt avant lui. Il est donc à la fois écrasé par la mort de son enfant, et renvoyé à la sienne.            

Quelle est, par rapport à tout cela, l’utilité d’un congé ?        

Il a d’abord une utilité réelle. Après la mort d’un enfant, un parent doit non seulement survivre à sa souffrance, mais s’occuper de sa famille. Et notamment accompagner ses autres enfants dans leur deuil. Et cela peut être très lourd. Parce que, à la douleur de la perte, les enfants ajoutent souvent celles dues à leur imaginaire. Un enfant peut se penser responsable, par exemple, de la mort de son frère, ou de sa sœur. Il peut, voyant qu’un enfant peut mourir, se mettre à craindre pour sa propre vie, etc... Et pour tout cela, il a besoin de ses parents. Et puis ce congé a aussi une dimension symbolique.      

Quelle est cette dimension symbolique ?     

Accorder un congé à un parent en deuil, c’est l’assurer que sa douleur est légitime, et que la société la reconnaît comme telle. Et c’est important. Notamment pour ceux qui se reprochent (il y en a) de ne pas réussir à faire face plus vite. Et c’est poser aussi qu’elle ne relève pas de la maladie. Ce qu’il peut croire s’il est obligé de demander un congé maladie. Et puis le congé est une façon de manifester aux parents endeuillés la solidarité de la collectivité. Et cela peut les aider à se sentir, dans leur désespoir, symboliquement soutenus, et donc un peu moins seuls.              

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