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C'est dans ma tête. L'instruction obligatoire à trois ans

L’âge de l’instruction obligatoire passera à la rentrée 2019 de 6 ans à 3 ans. Claude Halmos nous donne son avis.

Article rédigé par franceinfo, Claude Halmos
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
L'école à 3 ans, cela suppose une vraie prise en charge. (Getty Images)

Scolarisé à 3 ans, est-ce bien pour l'enfant ? 

Je crois que cela peut aider beaucoup d’enfants. Mais à condition que l’on mette en place une véritable prise en charge. Précisément, les neuro sciences vont être utilisées pour réfléchir aux capacités d’apprentissage des enfants.

Oui et c’est une bonne chose. Mais cela ne suffit pas. Parce qu’un enfant n’est pas seulement une tête, emplie de capacités cognitives à développer. Il est aussi une personne, singulière, qui a un corps, un psychisme, des émotions et qui est prise dans le tissage très complexe d’une histoire familiale, elle aussi singulière. Tout cela peut avoir une influence déterminante sur ses capacités cognitives, et doit donc être pris en compte.

On devra former les enseignants de maternelle

On a parlé notamment de les former à la "théorie de l’attachement", qui est une théorie, élaborée dans les années soixante par le psychologue John Bowlby, qui pose qu’un enfant a besoin, pour se développer, de tisser des liens avec des personnes de référence, qui soient attentives à ses besoins.

Il s’agit donc de réfléchir aux liens que les enfants tissent avec les enseignants,
et au point d’appui que ces liens constituent, pour les apprentissages. Ce qui est très important, même si c’est à manier avec précaution. Parce que la famille et l’école étant, pour l’enfant, deux univers très différents, on ne peut pas mettre les enseignants sur le même plan que les parents ou les nounous. Mais, là encore, cela ne suffit pas. L'intérêt de l’école à 3 ans est que l’enfant y arrive, porteur de tout ce qu’il a, bien ou mal construit dans sa famille (et qui va, nécessairement, influer sur ses capacités d’apprentissage) : son rapport à lui-même : peut-il, loin de ses parents, se sentir une personne à part entière et en sécurité ?


Son rapport aux autres : est-il, par rapport à eux, craintif ou, au contraire, agressif ? Ses capacités d’autonomie : peut-il, ou non, se débrouiller seul ? Etc… On peut donc, dès trois ans, évaluer où en est l’enfant, et l’aider, c’est à dire faire un travail essentiel de prévention. Mais on ne le peut qu’à certaines conditions.

Les conditions de la réussite

Il faudrait, d’abord, réduire l’effectif des classes, cela a été dit. Mais il faudrait aussi - et cela, me semble-t-il, n’a pas été (ou pas suffisamment) dit - former les enseignants au travail avec les familles. Parce que l’on ne peut pas aider un enfant de trois ans, si l’on n’aide pas, parallèlement, sa famille à l’aider. D’une part parce que ses problèmes renvoient toujours à sa vie familiale, et il faut qu’elle puisse évoluer. Et d’autre part parce que, si l’école ne prend pas en compte ses parents, ils peuvent se sentir exclus et même rejetés.


Et l’enfant risque, s’il avance dans le sens que l’école lui demande, de penser qu’il les trahit. Certains enfants refusent ainsi d’apprendre à lire, parce qu’ils ont peur de trahir leurs parents, qui sont illettrés. J’en ai rencontré. La main tendue, par l’école, à leurs parents est l’une des clefs de la réussite de très nombreux enfants. Et il ne faudrait jamais l’oublier.

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