Fin de vie : "Parler de suicide assisté et d'euthanasie, alors que la question des soins palliatifs n'est pas réglée, me pose problème", alerte le député Philippe Juvin

Philippe Juvin, député Les Républicains des Hauts-de-Seine était invité du "18h20 franceinfo", lundi 13 mai.
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Philippe Juvin, député Les Républicains des Hauts-de-Seine, chef des urgences de l’hôpital Georges Pompidou à Paris, invité de franceinfo le 11 mars 2024. (FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

"Il y a un défaut d'accès aux soins palliatifs qui fait que, parler de suicide assisté et d'euthanasie, alors même que la question des soins palliatifs n'est pas réglée pour tout le monde, me pose problème", a alerté lundi 13 mai, sur franceinfo Philippe Juvin, député LR des Hauts-de-Seine, membre de la Commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à l'accompagnement des malades et de la fin de vie, alors que les députés ont débuté l'examen du projet de loi sur la fin de vie qui prévoit d'ouvrir pour la première fois en France une "aide à mourir" pour certains patients.

Pour Philippe Juvin, "il y a un problème qui n'est pas réglé" en France. Selon lui, "une personne sur deux qui a besoin de soins palliatifs, en pratique, n'y a pas accès". Avec ce projet de loi, le député ne souhaite pas en arriver "à décider demain des suicides assistés ou des euthanasies par défaut d'accès aux soins palliatifs, ce qui, une fois sur deux est le cas, et une fois sur trois pour les enfants". Le député pointe "un sujet social" qui découle de ce projet de loi. "Quand vous êtes pauvre et que vous ne pouvez pas vous payer le fauteuil à 25 000 euros ou l'ordinateur à dépistage de votre paupière pour parler, forcément, la fin de vie est plus difficile."

"Personne ne sait évidemment définir le moyen terme"

Philippe Juvin s'interroge également sur les mots employés dans le projet de loi. Il souligne notamment que le texte prévoit que la demande de suicide assisté ou d'euthanasie puisse être faite alors que le pronostic vital est engagé "à court terme ou à moyen terme". "Personne ne sait évidemment définir le moyen terme", souligne le député. En tant que médecin, Philippe Juvin explique qu'il peut "prévoir, difficilement parfois, la fin de vie à quelques jours. En revanche, à six mois, c'est impossible. Or, c'est ce que la loi prévoit. Et ça, c'est un problème".

Philippe Juvin s'interroge également sur le texte de loi qui ne mentionne "nulle part", selon lui, les termes suicide assisté ou euthanasie. "Il y a une description d'un suicide assisté ou d'une euthanasie, mais les mots ne sont pas prononcés. Les mots n'apparaissent pas. On parle d'aide à mourir." Ce choix de formulation "n'est pas satisfaisant" pour le médecin. "J'aide à mourir tous les jours. Les gens, je les aide à mourir, mais pas en les tuant, en les accompagnant." Il y a donc pour le député "un vrai sujet sur les termes. Les bons termes ne sont pas utilisés. Et quand on n'utilise pas les bons termes, on crée du trouble."

"On peut être pour, on peut être contre le suicide assisté", ajoute encore Philippe Juvin. Mais il estime qu'il y a "un grand danger à légaliser, parce que dans tous les pays où ça a été légalisé, on a vu des dérives apparaître avec des catégories de gens qui n'étaient pas touchés initialement par la loi, qui le sont devenues". Le médecin plaide plutôt pour "mettre à niveau les soins palliatifs" et "faire en sorte que les gens puissent être accompagnés, y compris socialement". Le député pointe "le problème de l'isolement" ainsi que celui de "la fatigue des aidants". "Je suis médecin. Je peux vous assurer que toutes les demandes d'euthanasie que j'ai vues se sont résolues quand on apportait une réponse au patient ou à sa famille qui parfois est fatiguée."

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